La numérisation rend accessibles des millions de points de données sur la biodiversité

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La biodiversité terrestre est l’un des meilleurs outils de l’agriculture pour l’adaptation aux changements climatiques et la protection contre les menaces futures. Que ce soit à la recherche de plantes résistantes aux maladies ou de prédateurs naturels, les scientifiques puisent dans la « boîte à outils » de la nature pour trouver des solutions. Mais par où commencer?

« Imaginez une bibliothèque qui contient des millions de livres, mais qui ne dispose d’aucun ordinateur pour y chercher un titre ou un auteur », explique Heather Cole (Ph. D.), gestionnaire des données sur la biodiversité à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC).

Heather et ses collègues supervisent la numérisation des collections biologiques de référence d’AAC, qui renferment plus de 19 millions de spécimens physiques de plantes, d’insectes, de champignons, de bactéries et de nématodes à Ottawa, en Ontario. Certains spécimens sont âgés de centaines d’années, et chaque spécimen est identifié au moyen d’une étiquette écrite à la main ou à la machine; beaucoup d’entre eux demeurent largement cachés et inconnus.

Dans le but de rendre accessible cette information, AAC a entrepris une initiative de six ans d’une valeur de 30 millions de dollars nommée « BioMob » (pour Biological Collections and Data Mobilization, ou Mobilisation des collections biologiques et des données). L’objectif était de cataloguer numériquement les spécimens et de les rendre accessibles en téléversant des photographies et d’autres renseignements importants, notamment sur l’ADN dans le cas de certains spécimens! La numérisation de cette information permet au personnel d’AAC et à d’autres chercheurs de chercher des espèces précises ou de dégager des tendances. Grâce à l’investissement dans de nouveaux équipements et de nouvelles installations et à l’embauche d’une équipe attitrée au projet de six ans, l’initiative a accru la vitesse et la capacité de numérisation de la collection, ouvrant la voie pour un travail continu, même après la fin officielle du projet en mars 2022.

Parmi les collections, la Collection nationale de plantes vasculaires d’AAC à elle seule renferme plus de 1,5 million de spécimens et représente le plus important herbier du genre au pays. Au moyen d’un nouvel système d’imagerie à haut débit, l’équipe de Heather a photographié jusqu’à 2 000 spécimens de l’herbier par jour, et plus de 600 000 spécimens au cours de la durée totale du projet. Maintenant, Heather et un groupe toujours croissant qui compte plus de 1 000 bénévoles de la science citoyenne (en anglais seulement) entrent manuellement en ligne l’information figurant sur l’étiquette de chaque spécimen – son identification, l’endroit et le moment où il a été récolté, qui l’a récolté – pour finalement associer l’information et les images dans la base de données de l’herbier. Un projet semblable a été lancé pour les spécimens entomologiques en octobre 2022. En améliorant l’accessibilité des données, les efforts de l’équipe ouvrent diverses nouvelles possibilités.

« Les données représentent une si grande quantité d’information et ont tant de valeur, pour diverses raisons. Que vous soyez un chercheur tentant de trouver l’identité d’un champignon touchant une culture ou simplement une personne qui s’intéresse aux papillons, tout le monde peut y trouver son compte »

- Heather Cole (Ph. D.), gestionnaire des données sur la biodiversité, Agriculture et Agroalimentaire Canada

Transcription descriptive

[Une musique électronique entraînante commence.]

[Un gros plan sur des aiguilles et des cônes de pin de Virginie sur fond blanc.]

[Une échelle graphique positionnée sous une étiquette dactylographiée portant la description d'un spécimen de Pinus virginiana prélevé en 1975.]

[Un gros plan sur une étiquette dactylographiée où l'on peut lire : Système d'imagerie à haut débit, avec une échelle graphique positionnée sous celle-ci.]

[Une femme place sur un système de convoyeur une série de plateaux contenant des spécimens d'herbier de fleurs et de feuilles conservées à sec sur du papier blanc. Chaque spécimen possède un code-barres et une étiquette avec un texte descriptif. Les plateaux de spécimens passent par le processus du système d'imagerie. Les plateaux s'arrêtent dans une position entourée de lumières et d'une caméra suspendue. Les spécimens de plantes sur les plateaux roulent le long de la courroie du convoyeur. Une caméra affiche l'une des images d'un spécimen végétal pressé. Une femme retire le spécimen du plateau et place le plateau vide sur la rampe de retour. Elle examine l'image du spécimen de plante sur l'écran de l'ordinateur. Vue aérienne de plusieurs images de spécimens de plantes pressées avec des fleurs et des feuilles.]

[La musique s'arrête.]

[Mot-symbole du gouvernement du Canada]

[Fin.]

Confirmation de l’identification

Les images numériques sont particulièrement utiles « pour les agences d’inspection qui surveillent les espèces envahissantes ou nuisibles », indique Owen Lonsdale (Ph. D.), gestionnaire de la Collection nationale canadienne d’insectes, d’arachnides et de nématodes (CNC) d’AAC. Renfermant plus de 18 millions de spécimens, cette collection compte parmi les cinq plus grandes du genre au monde. Au moyen d’appareils photo, son équipe composée de nombreux étudiants et techniciens embauchés pour une durée déterminée grâce au financement du projet BioMob a ajouté près de 2,6 millions de nouvelles entrées à la base de données et a produit 850 000 images qui peuvent être utilisées à travers le monde.

« Pour toute personne voulant identifier du matériel en l’absence de la collection de recherche, le risque d’erreur d’identification est très élevé », explique Owen. « Les différences peuvent être extrêmement subtiles, et une erreur d’identification peut avoir d’importantes conséquences ». En identifiant correctement un organisme nuisible, les responsables de la réglementation peuvent freiner l’importation ou l’exportation d’organismes nuisibles présents dans les produits agricoles, et les producteurs peuvent éviter que des dommages soient infligés à leurs cultures.

Suivi des habitats et des espèces sauvages apparentées

Une autre des utilités des données numérisées sur la biodiversité est qu’elles permettent de suivre les changements dans l’habitat d’une espèce au fil du temps. On peut ainsi surveiller les espèces envahissantes ou les effets des changements climatiques. « Ou peut-être êtes-vous un enseignant qui veut amener sa classe dans un endroit intéressant, où vous pouvez trouver toutes sortes d’espèces différentes », ajoute Heather.

En plus d’aider les enseignants à trouver des « points chauds » de biodiversité, les données numérisées peuvent aider les chercheurs à étudier une espèce particulière et la façon dont elle s’est adaptée à différents environnements au fil du temps. Une plante qui pousse dans les Territoires du Nord-Ouest peut avoir une apparence différente d’une plante de la même espèce qui pousse en Ontario, par exemple, indique Heather.

De plus, les données sur la collection peuvent être utilisées pour trouver des espèces sauvages apparentées aux plantes alimentaires cultivées. Semblables sur le plan génétique aux plantes agricoles cultivées aujourd’hui, ces espèces présentes dans les milieux naturels n’ont pas été soumises aux mêmes processus de sélection sur des décennies visant à les rendre convenables pour la culture. « S’il existe des espèces locales, celles-ci peuvent posséder des caractères qui les aident à prospérer dans notre environnement », indique Heather. Parmi les caractéristiques utiles, nommons la pubescence, qui aide la plante à sembler moins intéressantes pour les insectes nuisibles.

Solutions naturelles aux organismes nuisibles

Grâce aux registres des centaines d’années d’élevage d’organismes nuisibles réalisé à la CNC, des liens peuvent être établis entre les espèces et leurs prédateurs naturels, information que les scientifiques peuvent utiliser pour trouver des solutions naturelles contre les ravageurs agricoles.

Selon Owen, plutôt que d’épingler immédiatement les spécimens entomologiques, les chercheurs devraient attendre un peu pour voir si quelque chose en émerge. En effet, des guêpes ou des mouches parasitoïdes peuvent pondre leurs œufs à l’intérieur d’autres insectes, et après l’éclosion les larves consomment leur hôte de l’intérieur avant d’en émerger. C’est la façon dont la nature limite les organismes nuisibles, et ces mêmes parasitoïdes peuvent parfois être utilisés pour lutter contre des organismes nuisibles dans les champs d’un producteur agricole, technique appelée « lutte biologique ». Actuellement au stade de projet pilote, cette carte interactive en ligne montre la répartition de la livrée d’Amérique, organisme nuisible connu, et de plusieurs de ses parasitoïdes.

« Il y a aussi beaucoup de gens qui s’intéressent aux mouches, abeilles et autres organismes qui pollinisent les plantes sauvages indigènes et les plantes cultivées ici au Canada », ajoute Owen. Grâce aux données numérisées, ces gens peuvent extraire une liste des organismes nuisibles ou des pollinisateurs associés à presque n’importe quelle plante sauvage ou cultivée au Canada, et vice versa.

Empreintes génétiques

Les plantes et les insectes peuvent souvent être identifiés à l’œil nu, mais dans le cas des espèces très étroitement apparentées ou des très petits organismes, comme les bactéries, les virus et les champignons, les chercheurs dépendent souvent de l’ADN pour l’identification. Chaque espèce possède une empreinte génétique unique, et de petites portions de cette empreinte peuvent être « lues » par les chercheurs, comme un code-barre à l’épicerie.

« Disons que vous allez dans votre jardin et que vous y prélevez une pelletée de sol, puis vous séquencez l’ADN de toutes les bactéries ou de tous les champignons qui s’y trouvent », dit Jeremy Dettman (Ph. D.), responsable à AAC du volet de caractérisation moléculaire du projet BioMob. En lisant les codes-barres génétiques provenant de l’échantillon de sol, les scientifiques peuvent associer ceux-ci à des entrées de la base de données et identifier les bactéries ou champignons présents; le succès de l’identification dépend toutefois de la quantité d’information que renferme la base de données. Le projet BioMob a permis au groupe de Jeremy de séquencer 19 000 codes-barres génétiques et 7 500 génomes complets ou partiels à partir des spécimens d’AAC, rendant ces nouvelles données de référence accessibles partout dans le monde. « Maintenant, plutôt que de se retrouver face à un organisme inconnu, ils trouveront une correspondance avec un organisme connu pour lequel le nom et les caractéristiques biologiques sont indiqués. »

« Nous créons les fondements qui appuieront la recherche sur la biodiversité dans l’avenir ainsi que tous les travaux qui dépendent de ces collections et des données moléculaires. »

- Jeremy Dettman (Ph. D.), chercheur scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada

De plus, les sélectionneurs et les chercheurs du secteur végétal peuvent utiliser les bases de données génétiques pour aider les plantes cultivées à s’adapter aux rapides changements climatiques. À l’aide des collections de semences de Ressources phytogénétiques du Canada (RPC), à Saskatoon, en Saskatchewan, l’équipe de Jeremy a extrait et consigné l’information génétique de certaines plantes cultivées et plantes sauvages qui leur sont apparentées. Cette base de données sur l’ADN peut aider les sélectionneurs de végétaux a rapidement trouver les plantes apparentées qui possèdent les caractéristiques recherchées, comme la tolérance à la sécheresse ou la résistance aux maladies, accélérant grandement le long processus de sélection.

Prochaines étapes

Environ 50 000 nouveaux spécimens sont ajoutés aux collections biologiques chaque année. Dans l’ensemble, le projet BioMob a permis de numériser plus de 1,4 million de nouveaux spécimens et d’ajouter près de 3,5 millions d’entrées au catalogue d’AAC, données qui peuvent maintenant être partagées facilement sur demande. L’équipe a aussi commencé à téléverser des données dans des ressources en libre accès, notamment le portail de données ouvertes du Canada, le portail Mycoportal (en anglais seulement) et le Système mondial d’information sur la biodiversité.

« Il ne s’agit que d’un début », affirme Owen, qui indique que près de 16 millions de spécimens doivent encore être catalogués. Mais après ce premier grand pas en matière de numérisation, l’équipe se prépare maintenant à continuer d’ouvrir l’accès à ces spécimens de grande valeur.

« En examinant les données, nous découvrons toutes sortes de choses dont nous ignorions auparavant l’existence. Les données mènent à de nouvelles pistes de recherche que nous n’aurions pas pu entrevoir », indique Owen.

Principales découvertes/avantages

  • De 2016 à 2022, 30 millions de dollars ont été investis dans le cadre du projet BioMob pour l’analyse d’ADN, la saisie de données et la numérisation de spécimens des collections biologiques d’AAC, notamment des invertébrés, des plantes vasculaires, des champignons, des gènes d’origine végétale et animale, des virus et des bactéries.
  • Le but visé était d’améliorer l’accessibilité et la facilité d’utilisation des données associées à ces collections, pour que celles-ci puissent profiter au secteur agricole et agroalimentaire canadien.
  • Ce travail a permis d’ajouter ou de mettre à jour plus de 3,5 millions d’entrées sur des spécimens, 1,4 million de nouvelles images de spécimens et près de 19 000 codes-barres génétiques.

Galerie de photos

Une jeune femme faisant dos à la caméra place des spécimens de plantes pressés et séchés de l’herbier sur un convoyeur à bande qui alimente un système d’imagerie automatisé.

Surnommé « Herbie » par le personnel, ce système à haut débit a permis de numériser les images de jusqu’à 2 000 spécimens d’herbier par jour, rendant ainsi ces données facilement accessibles.

Une photographie d’un spécimen d’herbier montre une petite plante pressée et séchée, composée de petites feuilles surmontées de deux petites fleurs jaunes, placée au centre d’un fond blanc.

Récolté en 1978, ce Dryas integrifolia est membre de la famille des Rosacées et est un représentant de l’emblème floral des Territoires du Nord-Ouest.

Une photographie d’un spécimen d’herbier montre deux spécimens de tournesol pressés et séchés comportant chacun des feuilles et une seule fleur.

Les collections préservent des enregistrements de la biodiversité. Récolté en 1849, ce tournesol indigène est un parent sauvage de l’espèce cultivée dont la génétique pourrait être utilisée pour les activités d’amélioration.

Une photographie d’un spécimen entomologique montre un insecte blanc avec des marques noires et deux antennes qui font presque deux fois la longueur de son corps.

Image numérisée d’un spécimen de Geloharpya confluens tanganjicae datant de 1978.

Un homme tient une vitrine d’exposition en verre encadrée contenant des échantillons d’insectes et y pointe des spécimens qu’il montre à trois visiteurs.

Owen Lonsdale montre des spécimens entomologiques, qui sont généralement épinglés ou autrement conservés et difficiles à numériser.

Photographie en gros plan d’un fossile d’insecte, où on voit le profil des ailes, des pattes et du corps dans un morceau d’ambre courbé.

Ce neuroptère (plus communément appelé « chrysope ») fossilisé est l’un des nombreux spécimens de la Collection nationale canadienne d’insectes, d’arachnides et de nématodes (CNC), qui est parmi les cinq plus grandes collections du genre au monde.

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