Indicateur de l'ammoniac d'origine agricole

L'indicateur de l'émission atmosphérique d’ammoniac d'origine agricole (nom officiel : indicateur des émissions d'ammoniac d'origine agricole) rend compte des émissions d'ammoniac dans l’atmosphère produites par les activités agricoles canadiennes, de 1981 à 2016. L'ammoniac est un gaz trace alcalin, réactif et toxique, composé d'azote et d'hydrogène, qui peut avoir des incidences négatives sur l'environnement et la santé humaine. Il est libéré par des processus naturels, comme la décomposition de l'urée (bovins et porcs) ou de l'acide urique (volaille) excrétés lors de la production animale ou l’application de fumier. Les émissions d'ammoniac proviennent aussi des engrais azotés appliqués qui contiennent de l'ammonium, de l’ammoniac ou de l'urée.

État et tendance d'ensemble

Au Canada, les émissions d’ammoniac dans l’atmosphère ont généralement augmenté en raison des activités agricoles. Depuis 1981, les émissions provenant des engrais azotés ont plus que doublé (passant de 58 kilotonnes d’ammoniac en 1981 à 58 kilotonnes d’ammoniac en 2016), alors que celles provenant des animaux d’élevage ont atteint un plateau et diminuent, depuis 2006. Ces chiffres reflètent la tendance nationale vers une augmentation des terres consacrées aux cultures annuelles et des secteurs d’animaux d’élevage dynamiques (diminution des bovins laitiers, augmentation de la volaille, une industrie du porc variable et des changements régionaux dans l’élevage du bœuf).

La carte interactive qui suit permet d’agrandir et d’explorer les émissions de différentes régions du Canada. Il est à noter que certaines des émissions les plus élevées par hectare de terres agricoles (attribuables aux animaux d’élevage ainsi qu’aux engrais azotés) sont observées dans la région du sud de l’Ontario et du Québec, dû à la densité élevée de bétail et les quantités de fertilisant appliquées. La forte densité de population humaine dans ces régions augmente le potentiel de répercussions sur la santé humaine. Les autres zones où sont enregistrées des émissions relativement élevées comprennent les régions des Prairies, qui reçoivent davantage de précipitations, et la vallée du bas Fraser de la Colombie-Britannique.

Depuis 1981, on observe une augmentation des émissions d’ammoniac dans l’ensemble des Prairies. Au cours de la même période, les émissions dans l’Est du Canada et dans la région de l'Atlantique ont affiché une tendance graduelle à la baisse. Les émissions nationales totales, qui étaient de 329 kilotonnes d’ammoniac en 1981, ont monté à 389 kilotonnes en 2006, pour ensuite baisser en 2011 et remonter à 396 kilotonnes en 2016. On peut constater ces tendances à la figure 2 et les explorer plus en détail dans la section sur les tendances particulières. La baisse d’émissions observée en 2011 était principalement due à une réduction temporaire de bétail associé à une éclosion d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB).

Figure 1: Émissions totales d'ammoniac provenant des animaux d'élevage et des engrais azotés au Canada, en 2016.
Légende:
Très faible Faible Moyen Élevé Très élevé
 

La carte interactive de la figure 2 montre l'évolution des émissions d'ammoniac de 1981 à 2016. Il est évident que les émissions augmentent dans les Prairies alors qu'elles baissent en Ontario, au Québec et dans la région de l'Atlantique.

Figure 2: Évolution des émissions totales d'ammoniac par hectare de 1981 à 2016.
Légende:
Grande diminution Diminution Peu ou pas de changement Augmentation Grande augmentation
 

Ces tendances en matière d'émissions peuvent aussi être constatées dans le graphique qui suit, qui fait état des émissions réelles, mesurées en kilotonnes par année. Le graphique montre des réductions dans les émissions totales en Ontario, au Québec, dans la région de l'Atlantique et en Colombie-Britannique et une augmentation des émissions totales au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta.

Figure 3 : Émissions totales d'ammoniac provenant des animaux d'élevage et des engrais azotés, par province ou région (la région de l'Atlantique comprend T.-N.-L., la N.-É., le N.-B. et l'Î.-P.-É.), en kilotonnes de N, de 1981 à 2016
 
Description - Figure 3
1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 2016
Colombie-Britannique 14,0 12,1 12,6 13,9 13,9 13,8 12,7 13,2
Alberta 70,2 68,9 78,8 97,0 112,6 110,2 109,5 112,4
Saskatchewan 45,3 49,6 50,8 66,0 64,7 70,3 77,8 84,0
Manitoba 27,3 30,0 31,0 38,2 41,6 45,1 44,1 46,6
Ontario 96,4 87,2 78,5 78,6 76,4 80,2 71,1 72,5
Québec 64,4 58,4 56,1 58,3 59,4 59,2 55,5 59,5
Région de l’Atlantique 11,4 11,3 10,9 11,0 10,8 10,2 7,7 8,2

Indice de performance des émissions d'ammoniac d'origine agricole

L'état et la tendance des émissions d'ammoniac d'origine agricole peuvent également s'observer dans l'indice de performance ci-dessous.

Figure 4: Indice de l'ammoniac
 
Description - Figure 4
Année Valeur de l'indice
1981 60
1986 63
1991 65
1996 64
2001 62
2006 62
2011 65
2016 63

La figure 4 présente une évaluation générale du statut des émissions d’ammoniac au Canada. L’index multifactoriel démontre une absence de tendance après 1986, qui témoigne de l’absence d’une augmentation ou réduction consistante d’émissions à l’échelle nationale, ainsi qu’une absence de changements concrets de la dispersion ou la concentration des sources d’émissions, malgré certaines variations régionales. Cette absence de tendance pour l’ammoniac est en contraste avec celles d’autres contaminants atmosphériques critiques, qui eux sont tous à la baisse. Cependant, cette situation est similaire à ce qui est observé chez d’autres pays industrialisés, ce qui aide à valider le modèle mais qui souligne l’importance de progrès futurs pour réduire les émissions d’ammoniac. Un index futur devrait prendre en compte l’exposition humaine et végétale aux émissions d’ammoniac.

À propos des indices de performance

Tendances particulières

Voici quelques tendances qui sont ressorties des données d’émissions atmosphériques d’ammoniac au Canada.

Tendance 1 – Les émissions d'ammoniac provenant des engrais azotés augmentent dans les Prairies

Les émissions d’ammoniac surviennent lors de l’épandage d’engrais azotés ainsi que de fumier d’animaux, à tous les stade de production et de manutention (stockage, épandage et en pâturage). La carte ci-dessous (Figure 5) illustre les changements dans les émissions d’ammoniac provenant des engrais à base d’azote dans les Prairies, en comparant les résultats de 1981 (à gauche) avec les résultats de 2016 (à droite). Au cours des 35 dernières années, les émissions d’ammoniac attribuables aux engrais azotés ont augmenté de façon considérable dans cette région, mais les émissions par hectare restent faibles.

Figure 5: Les émissions d'ammoniac provenant de l'application au sol d'engrais azotés de 1981 à 2016.
 
1981
2016
Légende:
Très faible Faible Moyen Élevé Très élevé
 

Raisons expliquant la tendance 1

Les émissions d’ammoniac provenant des engrais ont augmenté en raison d’une application accrue d’engrais azotés. En 2016, les émissions attribuables aux engrais comptaient pour 36 % des émissions totales d’ammoniac, une augmentation par rapport aux 23 % de 2006. Cette augmentation a été causée par une réduction de la mise en jachère et une augmentation du taux d’application d’engrais azotés. De plus, depuis 2006, la présence de plus petits troupeaux de bœufs ont entraîné une augmentation de cultures annuelles, aux dépends des cultures pérennes, et nécessitent davantage d’intrants. Le graphique ci-dessous (Figure 6) contraste l’utilisation d’engrais azotés dans l’Ouest (Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan et Manitoba) et dans l’Est (Ontario, Québec, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve et Labrador) canadien et aide à expliquer l’augmentation des émissions d’azote. En 1981, l’utilisation d’engrais azotés au pays était d’environ 0,94 million de tonnes d’azote; en 2016, elle avait presque doublé pour atteindre 2,5 millions de tonnes. Dans l’Ouest canadien, la consommation a plus de doublé, tandis que dans l’Est canadien, elle n’a augmenté que de 42 %.

Figure 6 : Utilisation d'engrais azotés (en million de tonnes d'azoté) de 1981 à 2016
 
Description - Figure 6
Région 1981 1986 1991 1996 2001 2006 2011 2016
Est canadien 0,29 0,32 0,29 0,29 0,31 0,30 0,34 0,45
Ouest canadien 0,65 0,90 0,87 1,29 1,25 1,23 1,64 2,10
Canada 0,94 1,22 1,16 1,58 1,55 1,53 1,98 2,55

Tendance 2 – Les émissions d'ammoniac attribuables au bétail diminuent

La figure 7 montre les émissions d’ammoniac associées à la production bétail. Les émissions attribuables aux animaux d’élevage ont baissé de 15 % de 2006 à 2016, les plus grandes baisses ayant eu lieu dans les Prairies.

Figure 7: Évolution des émissions d'ammoniac attribuables à la production de bétail de 2006 à 2016.
 
2006
2016
Légende:
Très faible Faible Moyen Élevé Très élevé
 

Raisons expliquant la tendance 2

Les baisses dans les émissions associées au bétail est due, en partie, à la réduction de la taille du cheptel de bovins au Canada, par suite de l'éclosion d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) de 2003. Cette crise, ainsi que d’autres facteurs, est à l’origine de la réduction du cheptel canadien de bovins, qui a perdu environ 3 millions de têtes, une baisse de 22 % depuis 2006. Le long cycle de reproduction des bovins fait en sorte que la récupération des populations a nécessité plusieurs années. Même si les populations porcines sont actuellement à la hausse, il y a eu des pertes d’environ 2 million de porcs durant cette période dû aux conditions difficiles du marché pour les producteurs. De plus, la taille des troupeaux de vaches laitières diminue graduellement alors que la production de lait par vache est en augmentation. Le seul secteur ayant vu une augmentation des émissions d’ammoniac est l’industrie de la volaille, puisque la production s’est accrue pour répondre à la demande du marché.

Ces tendances peuvent être observées à la figure 8, qui montre une baisse dans les émissions attribuables aux animaux d’élevage et une augmentation parallèle des émissions attribuables aux engrais azotés.

Figure 8: Émissions totales d'ammoniac (en kilotonnes de N)
 
Description - Figure 8
Émissions d'ammoniac en kilotonnes de N
  Animaux d'élevage Engrais
1981 271 58
1986 241 76
1991 245 74
1996 272 91
2001 288 91
2006 298 91
2011 258 121
2016 253 143
 

Pourquoi cet indicateur est important

L’ammoniac est un gaz basique (à pH élevé) soluble dans l’eau et qui réagit rapidement avec plusieurs gaz acides (SOx, NOx CL- et acides organiques) dans l’atmosphère, produisant des composés d’ammonium sous la forme de  particules fines (secondaires : PM2.5) qui peuvent contribuer au smog, à la visibilité réduite, et compromettre la santé humaine par le biais de maladies, cardiovasculaires et autres, pouvant ainsi réduire l’espérance de vie. De plus, l’ammoniac gazeuse peut être toxique pour certaines espèces végétales comme les lichens et les mousses, et le dépôt d’ammoniac dans des écosystèmes pauvres en nutriments (comme les marais et environnements alpins) peut résulter en la perte d’espèces.

Le secteur agricole du Canada produit la majorité (93 %) des émissions anthropiques d'ammoniac, et donc les particules secondaires à base d'ammonium, en particulier dans les zones près des grands centres urbains où l’ammoniac réagit avec les polluants gazeux provenant de l’industrie et du transport, tel que les NOx, SOx, et autres. Les épisodes de smog peuvent réduire la visibilité et avoir un impact négatif sur le tourisme, par exemple dans la Vallée du Fraser de la Colombie-Britannique. L'ammonium qui est lié aux particules ou aux aérosols peut voyager sur de longues distances, et traverser des frontières politiques, rendant difficile sa régulation. Dans le sol, l’ammoniac peut être rapidement transformé (oxydé) en nitrate et subséquemment dénitrifié en diazote gazeux, menant à l’émission d'oxyde nitreux, un gaz à effet de serre.

Un impact important des émissions d’ammoniac est la perte directe d'azote de qualité agricole, un élément nutritif essentiel aux cultures qui coûte cher, et qui doit être remplacé par d’autres sources de synthèse ou fixé biologiquement par les plantes. La perte de 396 kilotonnes d'ammoniac par les fermes canadiennes en 2016 équivaut à environ 13 % de tous les engrais azotés appliqués aux champs, ce qui représente un coût économique de 400 à 800 millions de dollars par année.

Le secteur de l'agriculture peut atténuer les émissions d'ammoniac en mettant en place diverses pratiques de gestion bénéfiques à tous les stades de production animale et d’application d’engrais azotés.

Pratiques de gestion bénéfiques

Les pratiques visant à faire baisser les émissions d'ammoniac sont axées sur la réduction des émissions provenant de l’application d’engrais azotés et des animaux d'élevage. À noter que de l’ammoniac peut être émis lors de la fabrication d’engrais azotés, mais ces émissions sont considérées comme étant d’origine industrielle et non agricole. La planification de la gestion des éléments nutritifs peut aider à réduire les émissions attribuables aux engrais azotés et au fumier, en n'appliquant que la quantité nécessaire à la croissance des cultures. Incorporer rapidement les engrais ou le fumier dans le sol par des techniques d'épandage en bandes latérales, d'injection ou labourage rapide réduisent les quantités d'ammoniac qui s'échappent dans l'atmosphère.

Puisque l'azote présente dans l’urine des animaux est la source primaire des émissions d'ammoniac par les animaux d'élevage, on peut réduire les émissions par la gestion des aliments en s’assurant que la quantité de protéines ne soit pas excédentaire. On peut réduire les pertes liées aux bâtiments d'élevage en ajoutant des produits chimiques à la litière (p. ex. des agents acidifiants) ou en concevant les granges de façon à séparer les matières fécales de l'urine de manière à ce que l’azote urinaire reste sous forme d’urée le plus longtemps possible avant d’être transformé en ammoniac et dioxyde de carbone. Au niveau des granges ventilées, l’ammoniac peut être absorbé par des purificateurs d’air. Dans les entrepôts de fumier, les pertes d’ammoniac peuvent être réduites par la formation de croûtes de la litière ou des couverts amovibles, en plus du froid hivernal qui ralentit les émissions. Le pâturage hivernal des bovins au lieu de l'alimentation dans les parcs d'engraissement d'hivernage peut aussi aider à réduire les émissions provenant de l'élevage, puisque l’urine est filtrée dans le sol avant d’être transformée en ammoniac.

À propos des indices de performance

L’indice de performance agroenvironnementale montre de la performance environnementale et les tendances au fil du temps, à partir d’une pondération du pourcentage de terres agricoles dans chaque catégorie d’indicateur, ce qui donne un indice variant de 0 (toutes les terres dans la catégorie la moins souhaitable) à 100 (toutes les terres dans la catégorie la plus souhaitable). Une valeur d’indice en augmentation dans le temps suggère une amélioration de la performance environnementale, tandis qu’une valeur en diminution suggère une détérioration de la performance environnementale.

Indicateurs connexes

Autres ressources et documents téléchargeables