Rôle des commerces alimentaires dans le soutien de systèmes alimentaires plus équitables et durables

Le Sommet sur les systèmes alimentaires de 2021 : Rapport de la concertation de l’étape 2
Date de la concertation : 26 mai 2021
Titre de la concertation : Rôle des commerces alimentaires dans le soutien de systèmes alimentaires plus équitables et durables
Organisé par : Agriculture et Agroalimentaire Canada ; Innovation, Sciences et Développement économique Canada
Lien vers la page Web de la concertation sur la passerelle (disponible en anglais seulement) : https://summitdialogues.org/dialogue/17312/

Participation

Nombre de participants[1] de chaque groupe de parties prenantes
Organisation non gouvernementale locale[2] 15
Peuple autochtone 1
Scientifiques et universitaires 10
Gouvernement et institution nationale[3] 3
Autre - S’est identifié comme « indépendant » et ancien directeur général d’une ONG ; groupe d’intervenants du secteur du commerce de détail ; échanges et commerce ; alimentation au détail 8
Total 37

1. Des participants se sont déclarés comme un groupe d’intervenants lors de l’inscription au concertation.

2. Les ONG locales comprennent des associations de l’industrie alimentaire et des organisations de la société civile.

3. Les participants gouvernementaux comprennent des représentants des gouvernements fédéral, provinciaux/territoriaux et municipaux et des administrations locales; des représentants du gouvernement fédéral ont participé à titre d’organisateurs, facilitateurs et secrétaires.

Axe majeur

Cette concertation était axée sur le dernier maillon de la chaîne d’approvisionnement au Canada, c’est-à-dire l’assiette des consommateurs – plus particulièrement sur le point de contact avec les consommateurs. Elle se concentrait sur les épiceries et les services alimentaires, mais incluait aussi les dépanneurs, les cafétérias et les autres points d’accès aux aliments. Même si ces commerces alimentaires sont très différents les uns des autres en fonction de leur contexte, ils servent tous à mettre les consommateurs en contact avec les aliments. Les types d’offres alimentaires sont vastes et diversifiés, et leurs prix varient. Puisque les commerces alimentaires peuvent déterminer l’accès des consommateurs aux aliments, ils ont un impact important sur l’accessibilité, la durabilité et la réponse à l’évolution des préférences des consommateurs. En se concentrant sur ces éléments particuliers, notre concertation avait pour objectif d’examiner les liens entre les pistes d’action 1, 2 et 5 :

  • Garantir l’accès de tous à des aliments sains et nutritifs en cherchant des façons d’améliorer l’accès à des aliments nutritifs et abordables;
  • Passer à des modes de consommation durables en étudiant les façons d’améliorer l’efficience de la chaîne d’approvisionnement et de distribuer les aliments d’une manière plus durable;
  • Renforcer la résilience aux vulnérabilités, aux chocs et au stress en étudiant des façons d’améliorer la sécurité alimentaire et de réagir à l’évolution des préférences des consommateurs.

Pendant la rédaction du document conceptuel pour la concertation, il est apparu que des liens étroits existaient entre ces trois pistes d’action – la sécurité alimentaire est étroitement liée à l’abordabilité et à des chaînes d’approvisionnement plus efficientes et plus durables, lesquelles améliorent à leur tour l’accessibilité. Ces pistes d’action correspondent également à plusieurs politiques, priorités, initiatives et engagements ministériels et gouvernementaux, notamment les suivants :

  • la Politique alimentaire pour le Canada (qui cherche à améliorer la sécurité alimentaire);
  • la campagne de sensibilisation à l’agriculture (qui cherche à sensibiliser les consommateurs, à accroître leurs connaissances sur les systèmes alimentaires);
  • les priorités d’Agriculture et Agroalimentaire Canada consistant à encourager les améliorations le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire du Canada, en collaborant avec l’industrie pour renforcer la capacité du secteur à développer et à améliorer le système alimentaire canadien afin de réduire les vulnérabilités et de créer un système alimentaire plus résilient.

En conséquence, cette concertation s’est concentrée sur les déclarations futures suivantes :

  • D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada continueront de favoriser le changement à l’appui d’un système alimentaire résilient, novateur et durable.
  • D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada peuvent améliorer considérablement l’accessibilité des aliments pour tous les Canadiens, notamment par l’utilisation et la promotion de technologies, d’innovations et de nouvelles approches d’approvisionnement et de distribution des aliments locaux.
  • D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada répondront de mieux en mieux aux préférences changeantes des consommateurs pour les aliments abordables, diversifiés et nutritifs.

Principaux résultats

Des thèmes communs ont été abordés dans la concertation en raison des liens entre les trois déclarations futures.

Principaux résultats :

  • Au début, la plupart des groupes de discussion ont eu du mal à comprendre la définition des « commerces alimentaires » comme étant tout endroit où l’on peut obtenir et acheter de la nourriture. Beaucoup de participants provenaient d’une ONG ou d’une banque alimentaire où la nourriture n'est pas achetée. Certains participants ont fait remarquer que les banques alimentaires sont « des clients au détail et des grossistes » qui mobilisent les dons en argent pour créer un pouvoir d’achat collectif.
  • L’accès à des aliments sains, abordables et durables qui répondent aux besoins de différents groupes est réalisé par une approche axée sur les personnes et décentralisée du système alimentaire, appuyée par des technologies novatrices et/ou numériques (par exemple, commerce électronique et autres plateformes numériques), et une réglementation simplifiée. L’atteinte de cet objectif serait favorisée par :
    • une meilleure connaissance des obstacles à l’accessibilité des aliments – du point de vue social, économique, culturel et autre;
    • un appui aux petits et moyens transformateurs ou entreprises, par le biais du partage de ressources communes telles que les technologies innovantes, les infrastructures et les approvisionnements alimentaires, pourrait contribuer à réduire les pertes et gaspillages alimentaires;
    • un appui aux initiatives locales qui s’attaquent aux problèmes dans leur collectivité.
  • Les participants ont reconnu que même si une approche décentralisée des systèmes alimentaires est extrêmement difficile à exécuter, elle est utile pour répondre aux divers besoins et situations à l’échelle du pays.
  • L’ampleur des opérations a une incidence sur l’innovation et l’investissement – les grandes sociétés s’en tirent beaucoup mieux que les petites et moyennes entreprises. Le financement pourrait cibler les petites et moyennes entreprises qui sont probablement mieux équipées pour appuyer les produits locaux.
  • La production d’aliments locaux a été souvent présentée comme la solution à l’insécurité alimentaire, de pair avec l’adoption de technologies innovantes comme le commerce électronique et l’agriculture verticale.
  • Le coût du transport et de la culture des aliments dans les endroits éloignés nous force à repenser le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement, particulièrement dans le Nord.
    • Les produits locaux sont privilégiés, mais ce n’est pas la seule solution.
  • Les participants ont également proposé de considérer le point de vue d’autres parties, comme les syndicats, les municipalités et les consommateurs qui vivent dans des déserts alimentaires. Par exemple, les administrations municipales pourraient jouer un rôle plus important en autorisant les marchés d’alimentation locaux à proximité des zones habitées.
  • Les participants reconnaissent que le système alimentaire du Canada est vulnérable aux chocs – y compris les chocs économiques et environnementaux – et que des changements s’imposent pour assurer sa résilience. Par exemple, on pourrait investir dans des aliments locaux (canadiens), évaluer les modèles de distribution et collaborer avec les producteurs, les urbanistes et d’autres acteurs importants.
  • La définition d’aliment « nutritif » varie énormément.
  • La réduction de la pauvreté a été citée comme un facteur clé pour régler les problèmes d’accessibilité des aliments.

Résultats pour chaque sujet de discussion

Dans les groupes de discussion, les participants ont analysé les déclarations futures suivantes :

D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada continueront de favoriser le changement à l’appui d’un système alimentaire résilient, novateur et durable.

Il convient de souligner que nous avions deux groupes de discussion portant sur cette déclaration future, ce qui a donné lieu à commentaires supplémentaires par rapport aux autres déclarations futures.

Les participants ont souligné que les grandes zones urbaines diversifiées ont besoin d’aliments adaptés à la culture et que certains groupes communautaires n’ont pas recours aux organismes caritatifs (banques alimentaires).

Un participant a noté que l’accès aux aliments est un droit humain, et qu’il aimerait voir une évolution du modèle de plateforme alimentaire délaissant le financement par subvention au profit d’un modèle autosuffisant grâce à l’investissement en capital, y compris le soutien pour le recours aux organisations alimentaires et aux agriculteurs locaux pour promouvoir le stockage et la réduction du gaspillage alimentaire.

Un participant a mis en lumière les défis logistiques et financiers à relever pour joindre les communautés éloignées. Le transport par camion ou par avion coûte cher, et l’exploitation d’une serre locale en hiver est extrêmement coûteuse. L’accent a été mis sur les moyens d’améliorer l’accès aux aliments nutritifs et abordables.

Les solutions proposées à des problèmes comprennent la promotion d’une « économie circulaire », axée sur l’aide aux fournisseurs locaux dans les petites et moyennes collectivités et le recours aux outils du commerce électronique pour améliorer les plateformes/réseaux alimentaires. Pour que ces solutions soient efficaces, les consommateurs doivent savoir comment les systèmes alimentaires fonctionnent. Comme la consolidation du système alimentaire du Canada fait peser une menace sur les communautés rurales, éloignées et autochtones, appuyer les fournisseurs régionaux pourrait contribuer à améliorer la résilience.

La révision des règlements et la réduction de la paperasserie peuvent améliorer la résilience et la durabilité du système alimentaire du Canada. Les petites et moyennes entreprises peuvent accroître leur résilience, mais elles ont besoin d’une aide financière pour atteindre ces objectifs, car elles n’ont pas le capital voulu pour investir dans la technologie dans la même mesure que les grandes organisations.

Les participants se sont dits favorables à un programme alimentaire pancanadien dans les écoles.

D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada peuvent améliorer considérablement l’accessibilité des aliments pour tous les Canadiens, notamment par l’utilisation et la promotion de technologies, d’innovations et de nouvelles approches d’approvisionnement et de distribution des aliments locaux.

Les participants ont indiqué que la prévalence des déserts alimentaires s’explique en partie par les problèmes de transport et les défis liés aux emplacements. Par exemple, dans les communautés rurales, éloignées ou autochtones, les personnes ont un accès limité aux aliments, car ils dépendent souvent de petites épiceries indépendantes.

Un participant a noté que dans les communautés autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest, les gens sont traditionnellement des chasseurs, et que pour certains survivants des pensionnats indiens, l’agriculture est seulement une activité qui nourrissait les prêtres (mais pas eux). Une connaissance plus complète du rapport à l’agriculture des différentes populations pourrait faciliter l’éducation des consommateurs afin d’améliorer l’accessibilité. Cela pourrait être fait par l’entremise des centres de connaissances que Financement agricole Canada est en train d’établir pour encourager les communautés et les entreprises à créer leur propre entreprise ou à participer au système alimentaire. La collaboration entre les consommateurs, les syndicats, la fédération des municipalités et le gouvernement fédéral est nécessaire pour comprendre les problèmes présents dans les différentes régions du pays et leur trouver des solutions tangibles. Une solution universelle ne fonctionnera pas.

Un participant a souligné l’importance du Programme de récupération d’aliments excédentaires dans les communautés des Territoires du Nord-Ouest et indiqué qu’une aide permanente est nécessaire pour améliorer la sécurité rurale dans les zones rurales et éloignées.

Les participants ont relevé les mécanismes existants qui peuvent être utilisés pour améliorer l’accessibilité :

  • le commerce électronique;
  • les champions locaux, ayant les compétences et les outils nécessaires, qui encouragent les efforts collaboratifs pour rendre les articles plus abordables;
  • l’utilisation d’une méthode s’appuyant sur des marchés fermiers collaboratifs, qui aide les familles à faible revenu en fournissant des fruits et légumes ainsi que des recettes mises au point par une nutritionniste;
  • la création d’organisations de récolte d’aliments locaux/de niche pour tirer parti des produits de niche qui poussent naturellement et donner aux groupes autochtones les moyens de mettre à profit leur savoir traditionnel pour améliorer l’accessibilité des aliments et l’autosuffisance économique.

D’ici 2030, les commerces alimentaires du Canada répondront de mieux en mieux aux préférences changeantes des consommateurs pour les aliments abordables, diversifiés et nutritifs.

Un participant a fait observer que la préférence des consommateurs est passée des types d’aliments aux aliments abordables. Les participants sont d’accord pour affirmer qu’il faudrait mettre l’accent sur la façon de répondre aux préférences des consommateurs tout en assurant l’accessibilité (car elle est liée à l’abordabilité) même pour les segments les plus vulnérables de la population. Parmi les solutions suggérées, citons les certificats de marchés fermiers (similaires aux coupons alimentaires) qui permettent aux citoyens à faible revenu d’obtenir des fruits et légumes frais, et le maillage direct des fournisseurs et des consommateurs par le biais des banques alimentaires.

Les participants reconnaissent que les subventions et les investissements dans la recherche influent sur les commerces alimentaires, et que les petits producteurs sont souvent négligés par ces types de financement, ce qui limite leur capacité de devenir des contributeurs clés dans les commerces alimentaires du Canada.

Selon les participants, même si les chaînes d’approvisionnement mondiales sont indispensables pour la résilience, des chaînes d’approvisionnement plus courtes sont aussi essentielles. Les producteurs de légumes du Canada ont besoin d’être mieux appuyés pour fournir des aliments abordables, diversifiés et nutritifs, mais leur accès aux programmes d’assurance est limité comparativement aux grandes cultures. La diversité des activités agricoles doit être appuyée par des programmes publics.

L’innovation est essentielle pour répondre aux préférences des consommateurs. En investissant dans des systèmes de culture de remplacement, comme les toits-jardins et l’agriculture verticale, l’innovation peut améliorer l’abordabilité des aliments nutritifs. L’achat en ligne est très difficile pour les communautés rurales, éloignées et autochtones, et les petites et moyennes industries n’ont pas la capacité voulue pour investir dans cette plateforme. L’aide aux initiatives en ligne doit être évolutive.

Points de divergence

Définition des éléments liés aux commerces alimentaires

  • Des questions ont été soulevées à propos de la définition d’aliments « locaux » – des environs immédiats, de la région, de la province ou du pays? Quelques participants ont aussi remis en question l’utilité de l’expression « aliments nutritifs », en précisant que la définition de « nutritif » a évolué au fil des ans.

Qui influence qui?

  • Certains participants ont fait remarquer que si les préférences des consommateurs peuvent influencer les commerces alimentaires, ces derniers peuvent aussi influencer les préférences des consommateurs.

Le problème est-il causé par les commerces alimentaires ou par la pauvreté?

  • Un participant a souligné que l’accessibilité des aliments ne peut être dissociée de l’inégalité des revenus, et que la pauvreté est la cause fondamentale du problème d’accessibilité des aliments.

Commerce électronique – une innovation qui profite à certains, mais qui en laisse d’autres de côté

  • Le commerce électronique a permis d’améliorer l’accessibilité pour certaines personnes, mais les autres qui vivent dans les milieux ruraux et éloignés et dans certaines communautés autochtones ont un accès limité à Internet haute vitesse ou aux ordinateurs, et sont souvent loin des épiceries. De plus, les consommateurs qui n’ont pas de carte de crédit peuvent être exclus de ces services en ligne, ce qui limite encore plus l’accès aux aliments.

Les solutions politiques et de financement peuvent aider les grandes entreprises, mais aussi nuire aux petits détaillants et aux commerces indépendants.

  • Plusieurs participants ont souligné que de nombreuses solutions seraient préjudiciables aux petites entreprises, notamment les épiciers indépendants dans les collectivités rurales et éloignées et les communautés autochtones, et ils veulent savoir comment les solutions pourraient être plus inclusives pour les petits détaillants.
  • Il y avait une certaine divergence d’opinions sur la raison d’être de la politique agricole – à savoir si la priorité devrait être d’assurer la disponibilité d’aliments abordables ou la rentabilité des exploitations agricoles.

Ces changements peuvent-ils être assortis d’incitatifs si l’accroissement des bénéfices n’est pas l’objectif ultime?

  • Certains participants ont fait remarquer qu’à l’heure actuelle, rien n’encourage l’industrie à améliorer la situation pour les collectivités rurales, éloignées ou autochtones, car cela ne leur procure aucun gain financier.