Cultures de couverture et travail du sol en bande pour la lutte à risque réduit contre les mauvaises herbes dans la production légumière dans l’est du Canada

Code du projet : PRR11-030

Chef de projet

Diane Lyse Benoit - Agriculture et Agroalimentaire Canada

Objectif

Évaluer l’efficacité et la rentabilité de diverses techniques de travail du sol en bande et cultures de couverture pour la lutte contre les mauvaises herbes dans les cultures de cucurbitacées, de choux maraîchers et de maïs sucré en Nouvelle-Écosse, à l’Île-du-Prince-Édouard et au Québec

Sommaire des résultats

Contexte

Une lutte optimale contre les mauvaises herbes est essentielle à la viabilité de la production légumière au Canada et repose principalement sur l’utilisation de quantités considérables d’herbicides de synthèse. La mise au point d’options de lutte non chimique contre les mauvaises herbes s’imposait toutefois afin d’aider les producteurs à ne plus dépendre uniquement des herbicides et à réduire le plus possible le risque d’apparition d’une résistance aux agents de lutte chimique.

Quelques approches de lutte contre les mauvaises herbes à l’aide de cultures de couverture ont été testées avec succès à l’étranger. Ces approches devaient toutefois faire l’objet de tests dans les conditions de production légumière du Canada avant d’être recommandées aux producteurs. Le présent projet échelonné sur trois ans visait à déterminer quelles sont les techniques de gestion des cultures de couverture présentant la plus grande efficacité contre les mauvaises herbes, permettant la plus grande réduction du recours à des herbicides et étant les plus susceptibles d’être adoptées par les producteurs.

Approche

Au total, 10 essais au champ sont effectués répartis entre le Québec, la Nouvelle Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard sur une période de trois saisons de croissance, de 2011 à 2013. Les approches évaluées ont été les suivantes :

  • a) utilisation de seigle d’automne comme culture de couverture;
  • b) travail du sol en bandes au printemps, culture d’avoine en bandes ou travail du sol en profondeur de façon à créer une bande dégagée de végétation permettant le semis de la culture commerciale dans la culture de couverture de seigle au printemps suivant;
  • c) écrasage au rouleau, avec ou sans pulvérisation de glyphosate à demi-dose (450 grammes de ingrédient actif par hectare) pour la destruction des cultures de couverture. Les traitements de culture de couverture sont comparé aux :
    • i) pratiques de désherbage classiques;
    • ii) désherbage manuel; et
    • iii) témoin non désherbé.

Dans tous les traitements, le seigle servait de paillis végétal mort et a été semé à l’automne précédant l’année d’essai et de l’évaluation. Au printemps suivant, lorsque le seigle était rendu à mi-anthèse (stade 61 de l’échelle BBCH – clé d’identification phénologique des céréales), habituellement à une hauteur de 105-125 centimètres (cm), il était détruit de façon mécanique en utilisant un rouleau crêpeur pour coucher les plantes sur la surface du sol. Dans certains cas, avant la destruction mécanique, du glyphosate a été pulvérisé sur le feuillage du seigle de façon à accélérer la mort des plantes. Par la suite, la culture commerciale était semée de façon directe (sans travail du sol) ou transplantée dans les résidus de seigle. Des essais avec la courge spaghetti et le maïs sucré sont effectué à la ferme expérimentale d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) de Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec; des essais avec des brocolis transplantés sont effectué à la ferme expérimentale d’AAC de Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard; finalement, des essais avec des courges musquées et des courges buttercup sont effectué dans les champs de deux producteurs à Lakeville et à Canning, en Nouvelle-Écosse. La combinaison de traitements appliqués variait d’une culture à l’autre dans les différents sites d’essais.

La culture de l’avoine en bandes, technique nouvellement introduite pour la création d’une zone de semis dégagée a été utilisée dans certains traitements. Cette technique consiste à semer simultanément des bandes d’avoine de 30 cm de largeur dans le lot de seigle à l’automne, espacées de façon coordonnée aux rangées où la culture commerciale sera plantée l’année suivante. L’avoine germe à l’automne en même temps que le seigle, mais ne survit pas à l’hiver, ce qui crée une zone sans végétation au printemps suivant. Cette technique a été adoptée à faciliter le semis direct sans travail du sol de la courge spaghetti dans la culture de couverture de seigle au printemps.

Dans d’autres essais, des techniques mécaniques de culture en bandes sont accomplies par : a) une bande de 30 cm de largeur cultivée à l’aide d’un rotoculteur vertical ou d’une décapeuse de résidus munis de dents en col de cygne (essais sur la courge spaghetti); ou b) le travail du sol en profondeur à l’aide d’une machine Zone Builder équipée de dents de sous-soleuse, d’un coutre circulaire et d’une unité de ramassage de débris pour créer une bande dégagée de 15 cm labourée à une profondeur de 30-35 cm (essais sur les courges musquées et les courges buttercup).

L’évaluation comprenait une comparaison de la biomasse de la culture de couverture avant la destruction à l’aide d’un rouleau crêpeur, de la couverture en mauvaises herbes au cours de la saison de croissance, de l’utilisation d’herbicide, des aspects économiques et du rendement des cultures de chacun des traitements.

Résultats

La culture de couverture de seigle n’a pas été efficace pour la lutte contre les mauvaises herbes dans les cultures de maïs sucré et de brocolis transplantés dans le cadre de notre étude et les données issues de ces essais ne sont pas incluses.

Par contre, le semis de seigle semble constituer une approche de rechange prometteuse pour la gestion des mauvaises herbes dans les cultures de courges. Pour une efficacité optimale de cette pratique, il s’est révélé essentiel que la biomasse de la culture de couverture soit suffisamment importante au printemps pour laisser une lourde couche de résidus couvrant complètement le sol (nombre supérieur sept tonne métrique par hectare). On a réussi à générer une telle biomasse en ayant recours à une forte densité d’ensemencement (150-190 kilogrammes par hectare) à l’automne et à un bon régime de fertilisation au début du printemps. Les cultures de couverture empêchent la germination des mauvaises herbes en prévenant la lumière et les mauvaises herbes à petites graines d’atteindre le sol. Le seigle a été particulièrement efficace contre les mauvaises herbes annuelles à feuilles larges.

Courge spaghetti : Dans l’ensemble, l’utilisation du seigle a constitué une approche efficace de lutte contre les mauvaises herbes pour la production de courges spaghetti; la couverture en mauvaises herbes est alors restée sous la barre des 10 %, ce qui en a fait une méthode plus efficace que la méthode classique, laquelle avait plutôt conduit à une couverture en mauvaises herbes de l’ordre de 12 à 25 %. Le recours à une culture de couverture de seigle a entraîné une réduction de 65 à 90 % de la couverture en mauvaises herbes par rapport au lot témoin non désherbé. La pulvérisation de glyphosate à demi-dose sur le seigle avant l’écrasage au rouleau a conduit à une réduction additionnelle de la couverture en mauvaises herbes. Généralement, les traitements comprenant une culture de couverture de seigle ont fait augmenter jusqu’à 27 % le rendement en courges spaghetti commercialisables en comparaison des témoins en période sèche, comme en 2012, mais l’ont plutôt réduit de 21 % en période pluvieuse, comme en 2013. L’application de glyphosate sur le seigle avant l’écrasage au rouleau a conduit à une augmentation importante du rendement commercialisables de courges, dans l’ordre de 28 à 56 %. Bien que l’utilisation de glyphosate ait fait augmenter les coûts de la lutte aux mauvaises herbes par hectare, elle en a fait diminuer les coûts lorsque l’on tient compte du rendement commercialisable de par l’augmentation du rendement qu’elle a entraînée. L’utilisation de glyphosate n’est pas essentielle au succès de cette technique, mais elle peut aider à accélérer et à uniformiser la destruction du seigle et, compte tenu des autres avantages, elle pourrait faire augmenter l’attrait de cette pratique aux yeux des producteurs.

Courges musquées et courges buttercup : Une culture de couverture de seigle combinée à un travail du sol en profondeur et à des traitements au glyphosate pourrait également constituer une option acceptable pour la lutte contre les mauvaises herbes dans le cadre de la production de courges musquées et de courges buttercup. Cette combinaison a permis de réduire la couverture en mauvaises herbes certaines années et a permis d’obtenir des rendements équivalents à la norme commerciale tant pour les cultures de courges musquées que pour les courges buttercup. L’utilisation de clomazone comme herbicide de prélevée pulvérisé en bandes sur les rangs travaillés en profondeur pourrait également aider à la lutte contre les mauvaises herbes ou à accroître le rendement des courges. Le recours au travail du sol en profondeur dans les cultures de couverture de seigle, avec ou sans application d’herbicide, est recommandé pour la production de courges en Nouvelle-Écosse.

Dans l’ensemble, tous les types de production de courges peuvent être avantagés par l’utilisation d’une culture de couverture de seigle, puisque les courges cultivées sur un paillis de seigle sont généralement plus propres au moment de la récolte et présentent des symptômes de maladie atténués.

Les recommandations découlant du projet comprennent notamment un certain nombre de modifications à apporter à l’équipement (par exemple adaptation d’un semoir à céréales), ainsi qu’une nouvelle technique de gestion des cultures de couverture (culture de l’avoine en bandes) nécessaires à l’application optimale de cette pratique sur le terrain. Un semoir adapté permet de semer simultanément de l’avoine en bandes dans les lots de seigle et la technique de semis de l’avoine en bandes élimine la nécessité d’appliquer un herbicide de prélevée pour la production de courges spaghetti.

Le présent projet constitue un exemple de collaboration fructueuse entre les scientifiques d’AAC et le milieu universitaire ainsi qu’avec les spécialistes provinciaux. Au fil de nombreuses présentations et journées passées sur le terrain, l’équipe du projet a informé et éduqué les producteurs concernant les avantages du recours à des cultures de couverture dans le cadre d’un programme intégré de lutte contre les mauvaises herbes.

Pour obtenir plus de détails, veuillez communiquer avec Mme Diane Lyse Benoit ou Mme Vicky Toussaint.