Développement et démonstration d'une boîte d'outils de lutte integré multi-tactique contre la mouche du chou dans les cultures Brassica

Code de projet : PRR09-050

Chef de projet

Bob Vernon - Agriculture et Agroalimentaire Canada

Objectif

Évaluer et démontrer l'efficacité des clôtures d'exclusion pour lutter contre la mouche du chou dans les cultures commerciales de rutabagas

Sommaire des résultats

Contexte

La mouche du chou Delia radicum L. (Diptera: Anthomyiidae) et un certain nombre d’espèces étroitement apparentées infligent de lourdes pertes aux producteurs de crucifères dans toutes les régions productrices du Canada. Deux organophosphates (chlorpyrifos et diazinon) sont homologués pour la lutte contre ces ravageurs, mais tous deux font actuellement l’objet d’une réévaluation par l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada. Des études ont par ailleurs confirmé l’apparition d’une résistance au chlorpyrifos chez un nombre croissant de populations de la mouche du chou en Colombie-Britannique (CB). L’utilisation de barrières physiques est une option de lutte à risque réduit qui est actuellement mise à l’essai dans le cadre de la Stratégie de réduction des risques liés à la lutte contre la mouche du chou dans la production de crucifères. L’objectif visé consiste à élaborer des outils pouvant être utilisés conjointement en contexte de lutte intégrée pour combattre de façon durable la mouche du chou dans les cultures de crucifères.

Approches

Ce projet visait à mettre au point des clôtures d’exclusion, à en évaluer l’efficacité comme outil novateur de lutte contre la mouche du chou et à en faire la démonstration auprès des producteurs. Un prototype a été mis au point en 2009. Ce prototype consistait en une bande de toile moustiquaire en nylon à mailles de 1 millimètre (mm) fixée à intervalles de 2,5 mètre (m) à des rails verticaux en aluminium de 1,3 m de hauteur. Chaque rail était prolongé d’une section additionnelle de 0,3 m de longueur repliée à angle de 45 ° vers le bas et l’extérieur du champ. Le haut de la toile moustiquaire était maintenu droit et bien tendu par une corde en nylon tendue entre chaque rail. À sa rencontre avec le sol, la toile s’étendait sous quelques centimètres de sol sur environ 0,2 m à l’intérieur du champ. Durant l’hiver, la toile de moustiquaire s’entrepose facilement roulée sur ses rails porteurs. En présence de conditions optimales, la durée de vie de cette clôture est estimée à une dizaine d’années.

Au cours de la première année (2009), des essais de démonstration ont été effectués dans deux champs de rutabaga, à Delta, CB. Deux champs témoins non clôturés ont été utilisés à des fins de comparaison. La superficie des parcelles oscillait entre 1,4 et 6,2 hectare (ha). En 2010, les essais, de nouveau réalisés à Delta CB, ont porté sur trois champs de rutabaga clôturés (1,4 à 4,1 ha) et un champ témoin non clôturé de 2,2 ha. Un de ces essais visait à évaluer un nouveau modèle de clôture commerciale mis au point par Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) sous le nom de Telstar Eco Fence, une partie du projet ayant pour but de mettre au point un prototype de clôture commerciale, d’en faire la démonstration et d’élaborer un manuel illustré afin de favoriser le transfert de technologie vers les producteurs. En 2010 et en 2011, l’efficacité de ce nouveau modèle de clôture a également évaluée dans le cadre d’essais à plus petite échelle en Saskatchewan et à Terre-Neuve.

Résultats

En 2009, les nombres de mouches du chou adultes et d’œufs pondus et l’ampleur des dommages infligés au rutabaga étaient moins élevés dans les champs clôturés que dans les champs non clôturés. À l’intérieur des champs clôturés, les effectifs du ravageur et les dommages étaient concentrés en périphérie de la culture dans un corridor pouvant atteindre 13 m de largeur. Les données donnent à croire que les clôtures d’exclusion peuvent être utilisées avec succès comme première ligne de défense contre le ravageur dans les champs de plus de 1 ha. Ces mêmes données indiquent que les producteurs qui clôturent leurs champs devraient aussi recourir à d’autres méthodes de lutte pour réduire les effectifs du ravageur et les pertes sur le pourtour de leurs champs.

En 2010, l’ampleur des dommages infligés et les effectifs du ravageur à l’intérieur des champs clôturés étaient plus élevés qu’au cours de l’année précédente, un plus grand nombre de mouches ayant franchi l’obstacle créé par les clôtures. La répartition spatiale des effectifs du ravageur et des dommages causés était par contre similaire à ce qu’elle était en 2009, les plus grands nombres de mouches adultes et d’œufs et les pertes les plus importantes étant observés dans les rangs les plus rapprochés de la clôture. Les champs choisis en 2010 étant différents de ceux sélectionnés en 2009, ces essais ont permis aux chercheurs de recueillir des informations précieuses et de déterminer les facteurs susceptibles de compromettre l’efficacité de la clôture comme outil de lutte antiparasitaire.

En 2011, le modèle commercial de clôture a été mis à l’essai en CB, en Saskatchewan et à Terre-Neuve. Les essais ont démontré que l’installation et le désassemblage de la clôture nécessitent un niveau d’expertise et de main-d’œuvre minimal. En ce qui a trait à sa durabilité, la clôture semble vulnérable aux forts vents, qui peuvent déchirer la toile moustiquaire et ainsi permettre au ravageur de franchir plus facilement la clôture. La protection conférée par la clôture était inférieure à celle fournie par l’insecticide chimique couramment utilisé, mais les résultats à l’intérieur des parcelles clôturées étaient meilleurs que ceux observés dans les parcelles non clôturées.

Au cours des trois années du projet, le degré de protection conféré par les clôtures d’exclusion a varié durant les essais menés en CB, en Saskatchewan et à Terre-Neuve. Les travaux menés dans le cadre de ce projet ont permis de cerner certains des principaux aspects liés à la sélection des champs qui peuvent influer sur l’efficacité de cette approche de lutte novatrice. La variabilité des résultats obtenus d’un site à l’autre et d’une année à l’autre confirme l’importance de tenir compte des critères suivants lors de la sélection des champs :

  • Topographie des terrains avoisinants – on évitera de choisir des champs entourés de terrains pentus ou surélevés, les mouches pouvant en pareil cas survoler facilement les clôtures et atteindre les champs.
  • Végétation autour des champs – les mauvaises herbes et autres Espèces végétales présentes autour du champ doivent être éliminées ou maintenues basses de manière à ce qu’elles n’altèrent pas le comportement de vol des mouches, celles-ci survolant généralementla végétation haute et pouvant ainsi franchir plus facilement la clôture pour atteindre le champ.
  • Présence dans les champs de faibles populations de mauvaises herbes de la famille des crucifères – ces plantes peuvent servir d’hôtes de remplacement et ainsi favoriser la réinfestation par le ravageur.
  • Pression exercée par la mouche du chou – cette pression doit être faible à modérée, car si elle est élevée, la clôture devient moinsefficace, les mouches étant proportionnellement plus nombreuses à franchir la clôture et occasionnant dès lors des dommages plus importants.
  • Plantes cultivées au cours de l’année précédente – ces cultures ne doivent être des espèces hôtes. Si des crucifères cultivées (ou des mauvaises herbes de cette famille) étaient présentes dans le champ l’année précédente, les pupes hibernantes du ravageur présentes dans le sol donneront naissance à une importante population de nouveaux individus à l’intérieur des champs clôturés.
  • Moment de l’érection de la clôture – la clôture doit être érigée avant la plantation des crucifères ou peu après.
  • Forme du champ – les parcelles carrées sont préférables aux parcelles étroites et allongées, une portion importante de la superficie de ces dernières se trouvant dans le corridor vulnérable bordant la clôture.

Un guide d’instruction illustré pour l’installation de la clôture commerciale a été élaboré dans les deux langues officielles. Ce guide facilitera le transfert de technologie aux producteurs. Des journées champêtres ont été organisées à des fins de démonstration de la technique aux producteurs en 2009 et en 2010 à Delta, CB. En outre, deux articles ont été soumis pour publication en 2009, deux actes de conférence ont été publiés en 2011 dans la foulée d’une rencontre internationale (Organisation internationale de lutte biologique) tenue à Dubrovnik, en Croatie, et les résultats du projet ont été communiqués dans le cadre de plusieurs autres publications et séminaires.

La clôture commerciale (Telstar Eco Fence) ne coûte pas plus cher que le prototype mis à l’essai en 2009, mais elle est plus facile à installer et à désassembler. Une évaluation approfondie des coûts associés à la fabrication, à l’installation, à l’entretien et au désassemblage de la clôture effectuée dans le cadre du projet a révélé qu’en cas de production à grande échelle, la clôture pourrait être une approche efficace par rapport au coût à titre de première de ligne de défense contre la mouche du chou. Par ailleurs, les informations sur la répartition spatiale des femelles ayant franchi la clôture amassées dans le cadre de ce projet pourraient faciliter l’élaboration d’une stratégie visant à exterminer les populations concentrées en périphérie des champs clôturés. La clôture d’exclusion pourrait être un élément de la trousse d’outils mise à la disposition des producteurs dans le cadre d’une approche de réduction des risques liés à la lutte intégrée contre la mouche du chou.

Pour obtenir de plus amples renseignements, communiquer avec Bob Vernon, AAC, Agassiz, CB.