Gaz à effet de serre d’origine agricole

Table des matières

Résumé

  • Les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’origine humaine et leur accumulation dans l’atmosphère sont la principale cause du réchauffement planétaire et des changements climatiques.
  • L’indicateur des gaz à effet de serre d’origine agricole évalue les émissions nettes (c'est-à-dire les gaz émis moins les gaz éliminés) de dioxyde de carbone, de méthane et d’oxyde nitreux provenant des terres agricoles du Canada et leur évolution dans le temps.
  • En 2021, l’agriculture était à l’origine de 5 % des émissions de gaz à effet de serre de l’ensemble des secteurs économiques canadiens.
  • Les émissions agricoles des trois gaz à effet de serre ont augmenté entre 1981 et 2021, mais les émissions nettes ont diminué. Cela s’explique par une augmentation considérable du stockage du carbone dans les sols agricoles au fil du temps.
  • Il faut continuer de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour atténuer les répercussions des changements climatiques. On peut atteindre cet objectif en améliorant la gestion du bétail et du fumier, ainsi que les pratiques culturales annuelles.

Les gaz à effet de serre d’origine agricole au Canada : pourquoi sont-ils importants?

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’origine humaine et leur accumulation dans l’atmosphère sont la principale cause du réchauffement planétaire et des changements climatiques.

La concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère est plus élevée aujourd’hui qu’au cours des 800 000 dernières années. Cela signifie que davantage d’énergie est captée dans l’atmosphère, ce qui augmente les températures de l’air et des océans, et influe sur les conditions météorologiques. Certains changements climatiques se produisent déjà : des conditions météorologiques extrêmes plus fréquentes et plus intenses (chaleur, sécheresse, inondations, gelées non saisonnières, vents violents); une saison de croissance plus longue et plus chaude; et un changement dans les régimes de précipitations de pluie et de neige. Ces changements ont un impact sur de nombreux aspects de la vie, y compris la production alimentaire. L’agriculture dépend d’un climat stable et favorable pour obtenir des rendements constants et rentables.

Le secteur agricole joue un rôle important dans les changements climatiques et peut servir à la fois de source et de puits (c'est-à-dire d’élimination) d’émissions de gaz à effet de serre. En 2021, l’agriculture et l’élevage étaient à l’origine d’environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

Les pratiques agricoles qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre et augmentent le stockage du carbone dans le sol peuvent être bénéfiques pour l’environnement et améliorer la productivité ainsi que la rentabilité des cultures. La constitution de réserves de carbone dans le sol peut améliorer la qualité et la résilience des sols. Les pratiques de gestion qui améliorent l’efficacité de l’utilisation des éléments nutritifs peuvent réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer la rentabilité des producteurs en réduisant les pertes de nutriments. Les producteurs qui peuvent démontrer qu’ils réduisent les émissions de gaz à effet de serre en pratiquant une agriculture durable peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel lorsqu’il s’agit de commercialiser leurs produits. De nombreux grands détaillants, grossistes et transformateurs d’aliments privilégient les produits et services ayant une incidence réduite sur les changements climatiques. Par exemple, certaines entreprises canadiennes affirment être carboneutres. Elles sont parvenues à la carboneutralité en réduisant les émissions de leurs propres activités, en investissant dans des projets qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre ou qui stockent le carbone et en achetant des produits d’entreprises qui adoptent ces pratiques.

Le gouvernement du Canada doit également rendre compte des émissions de gaz à effet de serre provenant des terres agricoles. Ces rapports permettent d’informer les Canadiens et les autres pays sur la contribution des activités agricoles aux émissions nationales de gaz à effet de serre, et pourraient être utilisés pour fournir des renseignements sur les pratiques de gestion réduisant les effets sur l’environnement.

Comment l’agriculture contribue-t-elle aux émissions de gaz à effet de serre?

La température de la Terre est déterminée par la quantité d’énergie thermique du soleil qui est piégée dans notre atmosphère ou renvoyée vers l’espace. Les gaz à effet de serre jouent un rôle essentiel dans l’atmosphère, en captant le rayonnement et en maintenant la Terre à des températures favorables à la vie. Même si les GES sont essentiels pour la planète, le cumul des émissions de ces gaz d’origine humaine dans l’atmosphère est susceptible d’entrainer des changements climatiques importants; en fait, nous subissons déjà les effets d’un climat en évolution. Les trois principaux gaz à effet de serre émis par l’agriculture sont l’oxyde nitreux (N2O), le méthane (CH4) et le dioxyde de carbone (CO2). 

Les principales sources d’oxyde nitreux sont la décomposition des engrais appliqués dans les champs, la décomposition des résidus de culture et le stockage du fumier. L’oxyde nitreux peut également être libéré dans l’atmosphère lors de la lixiviation et du ruissellement de l’azote dans les cours d’eau et du dépôt dans l’air de l’ammoniac émis par les engrais et le fumier.

Le méthane est principalement émis dans l’atmosphère par la digestion des aliments (digestion entérique) chez les ruminants tels que les bovins, les moutons, les chèvres et les bisons. Les bovins sont la principale source de méthane d’origine agricole et contribuent à environ 89 % des émissions. Les émissions de méthane varient d’une année à l’autre en fonction des populations de bovins de boucherie et laitiers. Le méthane provient également de la décomposition du fumier entreposé.

Les émissions de dioxyde de carbone proviennent principalement de la décomposition des végétaux, des amendements du sol, des engrais et de l’utilisation de combustibles fossiles. Le dioxyde de carbone est libéré du sol lorsque la matière organique du sol se décompose. Cette dégradation peut être accélérée par une perturbation du sol telle que le travail du sol. De nombreux amendements et engrais contiennent du carbone, comme le calcaire (carbonate de calcium), la dolomite (carbonate de calcium et de magnésium) et les engrais à base d’urée. Le dioxyde de carbone est également libéré par les machines agricoles qui utilisent des combustibles fossiles comme source d’énergie et pendant la fabrication de certains de ces équipements et engrais. 

Si la décomposition, les amendements et la gestion peuvent être une source de dioxyde de carbone, les terres agricoles ont également le potentiel de stocker d’importantes quantités de carbone. Les végétaux extraient le dioxyde de carbone de l’air au cours de la photosynthèse et le transforment en glucose, une forme de sucre contenant du carbone. Il est utilisé dans la croissance et le développement et emmagasiné dans les tissus végétaux. Lorsque les végétaux se décomposent, une partie du carbone s’accumule dans le sol sous forme de matière organique. De plus, les cultures pérennes (fourrages, arbustes, arbres) peuvent emmagasiner et fixer le carbone dans leurs racines et leurs structures aériennes pendant des années, voire des décennies. Cela peut compenser une partie des émissions de gaz à effet de serre d’origine agricole. 

Indicateur des gaz à effet de serre d’origine agricole

L’indicateur des gaz à effet de serre d’origine agricole évalue les émissions nettes (c'est-à-dire les gaz émis moins les gaz éliminés) de dioxyde de carbone, de méthane et d’oxyde nitreux provenant des cultures et du bétail du Canada. Les émissions sont estimées à l’aide d’une approche reconnue à l’échelle mondiale et recommandée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Elle est ensuite adaptée pour tenir compte des conditions agricoles propres au Canada, telles que les conditions climatiques, les caractéristiques des cultures, de même que la production et la gestion du bétail.

Plusieurs étapes sont utilisées pour estimer les émissions, notamment :

  1. Collecte de données telles que les données climatiques à long terme, la superficie de chaque type de culture, le taux d’application des engrais azotés pour chaque type culture, la population, l’état de reproduction, le poids, la consommation d’aliments et les pratiques de gestion du bétail et de son fumier.
  2. L’estimation d’informations supplémentaires telles que la quantité d’azote présente dans les résidus de culture, l’azote excrété par le bétail, l’apport d’énergie du bétail et le taux de variation du carbone du sol.
  3. Le calcul des émissions de chaque gaz à effet de serre pour déterminer les émissions totales.

L’indicateur des gaz à effet de serre d’origine agricole est calculé chaque année. L’indicateur permet de montrer comment les émissions de gaz à effet de serre sur les terres agricoles ont évolué au fil du temps. Et, surtout, il aide à cerner les domaines dans lesquels des modifications des pratiques agricoles peuvent réduire ou atténuer les impacts de l’agriculture sur l’environnement et le climat.

Gaz à effet de serre d’origine agricole au Canada : situation actuelle et évolution dans le temps

Situation actuelle

En 2021, l’agriculture était à l’origine d’environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre de l’ensemble des secteurs économiques canadiens.

L’intensité des émissions de gaz à effet de serre était généralement plus faible dans l’ouest du Canada que dans l’est du Canada. De nombreux facteurs expliquent cette différence. Dans les provinces des Prairies, le type de sol et le climat favorisent des pratiques appropriées de gestion des terres qui peuvent améliorer le stockage du carbone dans le sol. Dans l’est du Canada, les conditions plus humides favorisent une augmentation des émissions d’oxyde nitreux, et la saison de croissance plus chaude et plus longue permet des cultures à haut rendement, gérées de manière intensive et nécessitant beaucoup d’engrais (comme le maïs). De plus, le nombre de bovins laitiers dans l’est du Canada a diminué, ce qui a entraîné le remplacement de cultures pérennes par des cultures annuelles, qui stockent moins de carbone dans le sol. 

Malgré cela, certaines régions de l’ouest du Canada ont des émissions aussi élevées que celles de l’est du Canada. Ces zones ont généralement de grandes concentrations de bovins de boucherie ou de porcs, ou sont des zones de sols noirs humides où les émissions d’oxyde nitreux sont importantes.

Émissions nettes de GES (kilogrammes d’équivalents CO2 par hectare) en 2021

Évolution dans le temps

Les émissions des trois gaz à effet de serre ont augmenté entre 1981 et 2021 : l’oxyde nitreux a augmenté de 49 %, le méthane de 5 % et le dioxyde de carbone de plus de 150 %. Toutefois, sur la même période, les émissions nettes de gaz à effet de serre ont diminué. Cela s’explique principalement par la forte augmentation, au fil du temps, du stockage de carbone par les sols agricoles dans les Prairies.

Les émissions d’oxyde nitreux ont augmenté principalement en raison de l’application croissante d’engrais azotés utilisés pour augmenter les rendements des cultures. L’utilisation d’engrais azotés a augmenté de près de 300 % dans l’ouest du Canada et de 64 % dans l’est du Canada. L’augmentation des émissions d’oxyde nitreux s’explique également par une plus grande quantité d’azote dans les résidus de culture (en raison de l’augmentation de la production agricole) et une augmentation de l’azote excrété dans le fumier (en raison de l’augmentation du cheptel et de la taille des animaux).

Les émissions de méthane n’ont augmenté que de 5 % en 2021 par rapport à 1981, mais elles ont considérablement évolué au fil du temps. Étant donné que la majorité des émissions de méthane d’origine agricole provient des bovins de boucherie et laitiers, les changements intervenus au fil du temps sont dus à l’évolution de ces systèmes. Les populations de bovins laitiers ont diminué régulièrement depuis 1981 en raison de l’augmentation de la production de lait par vache laitière; une vache laitière d’aujourd’hui peut produire jusqu’à trois fois plus de lait qu’une vache laitière d’il y a 50 ans. Les populations de bovins de boucherie ont augmenté jusqu’en 2006 et ont diminué d’environ 25 % depuis. Le déclin de la population est attribuable aux effets persistants de la crise de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), à la forte valeur de la devise canadienne, à la hausse des coûts au Canada et à la baisse de la consommation de bœuf dans notre alimentation. Toutefois, la réduction des émissions dues au déclin de la population bovine a été partiellement compensée par la hausse des émissions par animal; en 2021, les animaux étaient plus productifs et ont donc consommé plus d’aliments, ont produit plus de fumier et étaient plus gros qu’en 1981.

Les émissions de dioxyde de carbone ont plus que doublé entre 1981 et 2021 en raison de l’augmentation de l’utilisation d’engrais et d’amendements contenant du carbone. Ces produits fournissent les éléments nutritifs nécessaires à la croissance des cultures ou réduisent l’acidité du sol, mais ils libèrent également du dioxyde de carbone dans l’atmosphère après leur application.

D’autre part, on a noté une augmentation importante des superficies sur lesquelles des pratiques de gestion bénéfiques ont été mises en œuvre entre 1981 et 2021, ce qui a permis d’améliorer le stockage du carbone dans le sol. Ces pratiques comprennent la réduction de la superficie en jachère, l’adoption accrue de pratiques de conservation du sol telles que le travail réduit ou sans labour, et l’augmentation des cultures pérennes. En outre, grâce à l’adoption de variétés de cultures à rendement plus élevé et à l’amélioration des pratiques de fertilisation, les cultures canadiennes sont devenues de plus en plus productives au fil du temps. Cette augmentation de la productivité s’est traduite par un retour au sol d’une plus grande quantité de résidus. Ensemble, l’adoption de pratiques de gestion bénéfiques et l’augmentation de la productivité ont permis de restituer davantage de carbone au sol et de ralentir le rythme de décomposition des matières organiques, ce qui se traduit par une plus grande accumulation de carbone dans le sol.

Évolution des émissions nettes de GES d’origine agricole (kilogrammes d’équivalents CO2 par hectare) de 1981 à 2021

Dans une grande partie des Prairies, l’intensité des émissions nettes de gaz à effet de serre n’a pas changé ou a diminué. Cela s’explique par l’adoption de pratiques de gestion des cultures bénéfiques et par l’augmentation de la productivité des cultures, qui ont toutes deux favorisé un stockage plus important du carbone dans le sol. Toutefois, dans certaines régions, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté, principalement en raison de l’accroissement des populations animales et de l’application d’engrais.

Dans l’est du Canada, dans certaines régions de l’Ontario, la vallée du fleuve Saint-Laurent et la vallée du fleuve Saint-Jean ont connu une augmentation des émissions. Cela s’explique par l’augmentation des cultures annuelles (en partie à cause de la contraction du cheptel laitier) et par l’utilisation de cultures ayant des besoins élevés en azote, comme le maïs.

Comment réduire les gaz à effet de serre d’origine agricole?

Pour que le secteur agricole puisse continuer à répondre à la demande croissante de denrées alimentaires, d’aliments pour animaux, de biocarburants et d’autres produits, tout en réduisant les émissions, les producteurs devront innover et adopter des pratiques de gestion bénéfiques qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre agricoles. Voici certaines options :

  • Animaux d’élevage
    • Gestion de la nourriture pour animaux : ajout d’huiles comestibles ou d’autres substituts et additifs dans les aliments pour animaux pour réduire les émissions de méthane.
    • Gestion du fumier : adopter des pratiques visant à réduire les émissions directes ou à capter les émissions à des fins de bioénergie.
    • Gestion des pâturages : mettre en œuvre des pratiques de gestion des pâturages telles que des périodes de pâturage intensif de courte durée suivies de longues périodes de récupération. Cela peut favoriser le stockage du carbone dans le sol en maximisant la repousse des herbes et la restitution des résidus.
  • Cultures annuelles
    • Gestion du travail du sol : adopter des pratiques de travail du sol à émissions faibles ou nulles.
    • Jachère d’été : diminuer la superficie de la jachère d’été.
    • Rotation des cultures : inclure dans la rotation des cultures ayant de faibles besoins en engrais azotés, comme les légumineuses à grains et autres légumineuses.
    • Couvert végétal permanent : augmenter la superficie des cultures pérennes pour accroître le stockage du carbone dans les sols agricoles.
    • Gestion des engrais : optimiser l’utilisation des engrais azotés et réduire les émissions d’oxyde de diazote en utilisant une variété de pratiques de gestion conçues pour faire correspondre la demande d’azote des cultures avec l’apport.
    • Gestion de la couverture du sol : Utiliser des cultures de couverture et des cultures intercalaires pour maximiser la durée et la superficie de la couverture vivante du sol. Cela augmentera la quantité de résidus végétaux restitués au sol.
  • Utilisation multiple des terres
    • Le sylvopastoralisme (utilisation de terres boisées pour le pâturage) peut fournir des terres supplémentaires pour l’agriculture tout en augmentant la productivité et le stockage du carbone dans le sol et dans la biomasse ligneuse. La création de pâturages sylvestres pourrait également contribuer à l’engagement du Canada de planter 2 milliards d’arbres d’ici 2030.
Description de l'image ci-dessus

Une infographie montre un paysage agricole avec des cultures, un tracteur, du sol et du bétail dans un pâturage situé près d’un paysage naturel où se trouvent un cours d’eau, une forêt et des animaux sauvages. Des zones de texte sont placées à côté d’éléments précis des paysages afin d’identifier leur lien avec les indicateurs de durabilité agricole. Une zone de texte identifie chacun des indicateurs suivants : couverture du sol, particules, matière organique du sol, érosion du sol, salinisation du sol, azote, pesticides, phosphore, ammoniac, gaz à effet de serre, coliformes et habitat faunique. Des flèches sont utilisées pour relier les zones de texte afin de montrer les liens entre les éléments.

Les indicateurs agroenvironnementaux (IAE) d’Agriculture et Agroalimentaire Canada donnent un aperçu scientifique de l’état actuel et des tendances du rendement agroenvironnemental du Canada en ce qui concerne la qualité du sol (matière organique du sol, érosion du sol, salinisation du sol), la qualité de l’eau (azote, pesticides, phosphore, coliformes), la qualité de l’air (particules, ammoniac, émissions de gaz à effet de serre) et la gestion des terres agricoles (utilisation des terres agricoles, couverture du sol, habitat faunique). Bien que les résultats des indicateurs soient présentés individuellement, les agroécosystèmes sont complexes, de sorte que bon nombre des indicateurs sont interreliés. Cela signifie que les changements dans un indicateur peuvent être liés à des changements dans d’autres indicateurs.

Indicateurs connexes

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