En se servant du capital naturel, des chercheurs protègent la santé de l’environnement, la santé humaine et la santé de la faune

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Tout le monde connaît l’importance des terres agricoles. Ces champs précieux nous fournissent des aliments essentiels à notre survie et sont indispensables ici au Canada et ailleurs dans le monde. Saviez-vous cependant que les paysages agricoles peuvent également contribuer à réduire les effets de la crise climatique, à sauver des oiseaux menacés et même à réduire la propagation du virus du Nil occidental?

Dans le cadre de ce qu’ils appellent ECO2 (pour Environmental Change One Health Observatory) [traduction libre : Observatoire « Une seule Santé » face aux changement environnementaux], les chercheurs principaux d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) collaborent avec leurs homologues d’autres ministères et organismes fédéraux, ainsi qu’avec l’industrie, les producteurs agricoles, les organisations non gouvernementales et le milieu universitaire afin d’étudier les nombreuses interactions entre les activités agricoles, la santé de l’environnement et la santé humaine. Ensemble, ils étudient les avantages, les compromis et la valeur du capital naturel, c’est-à-dire les ressources et les caractéristiques terrestres naturelles, notamment les zones riveraines (bandes de terre situées près des cours d’eau), les milieux humides, les réseaux hydrographiques et les zones bordant les champs comme les limites forestières et les haies. Dans les agroécosystèmes, ces éléments paysagers peuvent offrir plusieurs avantages sur le plan écologique, comme la protection de la qualité des sols et de l’eau, la séquestration du carbone et la promotion d’une plus grande biodiversité. Quelles sont toutefois les répercussions de ces caractéristiques naturelles sur la collectivité locale, la faune locale ou le bénéfice net de l’agriculteur?

Ce projet se distingue par l’approche « Une seule santé », une vision globale prenant en compte à la fois la santé de l’environnement, la santé humaine et la santé animale. Ce projet rassemble différents intervenants responsables d’élaborer des pratiques agricoles durables et des outils innovants afin de répondre aux critères de la vision « Une seule santé », tout en maintenant et en augmentant la productivité agricole.

Des éléments de solution pour des agroécosystèmes plus résilients

Dans le cadre du projet ECO2, l’équipe mène des activités de recherche à long terme sur le paysage agricole du bassin versant de la Nation Sud, situé à 40 minutes au sud d’Ottawa (Ontario). L’équipe y a recueilli presque toutes les données possibles sur la qualité des sols et de l’eau, les émissions de gaz à effet de serre, les ravageurs, les pollinisateurs, d’autres invertébrés (insectes) et plus encore afin d’acquérir une compréhension globale de l’environnement local et des interactions qui s’y opèrent.

Pour entreprendre l’une des principales activités du projet ECO2, l’équipe a demandé l’aide et l’approbation d’agriculteurs locaux et de la municipalité pour étudier les répercussions du dragage des canaux et de l’élimination de la végétation naturelle (arbres, arbustes) autour de certains fossés; des pratiques agricoles qui sont couramment utilisées pour améliorer le drainage des champs et accroître la productivité des cultures.

« Nous voulions savoir ce qui se passe lorsque l’on réduit considérablement le capital naturel d’un agroécosystème. Qu’est-ce qui change sur le plan des services écologiques? Quelles sont les répercussions et qu’est-ce qui disparaît? Quels avantages en découlent? » [traduction libre], demande David Lapen, le chercheur d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à la tête d’ECO2.

Jusqu’à présent, leurs résultats ont montré comment :

  • les écosystèmes en bordure des champs agricoles peuvent contribuer à la séquestration du carbone, à la dissipation des pesticides, à la purification de l’eau et à l’absorption des éléments nutritifs excédentaires;
  • des éléments naturels et semi-naturels autour de la ferme (par exemple, les brise-vent, les zones riveraines) peuvent être des hauts lieux de biodiversité offrant des réseaux nourriciers à la faune. Ces points chauds abritent également des insectes auxiliaires comme des pollinisateurs, des insectes qui contribuent à la régulation de maladies vectorielles et des prédateurs naturels des ravageurs;
  • les fourrages et les prairies fournissent plusieurs services écosystémiques, notamment en renforçant la structure des sols et en réduisant le débit de pointe des crues;
  • l’amélioration de la santé des sols peut réduire l’utilisation de pesticides et d’engrais, tout en augmentant la productivité des cultures.

Toutes ces données sont transformées en modèles et en outils décisionnels qui permettront de prédire plus facilement comment les modifications de ces éléments du paysage — qu’elles soient environnementales ou anthropiques — influeront sur les émissions de gaz à effet de serre, la propagation de phytopathogènes et de maladies vectorielles, etc., et peut-être même la prédiction de la qualité de l’eau depuis l’espace.

« La prédiction est un des piliers de l’atténuation des impacts… Ces outils prédictifs peuvent également être utilisés pour améliorer notre capacité à estimer la séquestration du carbone dans tout le pays et à produire des données qui profiteront à d’autres secteurs que l’agriculture, notamment la foresterie, l’énergie et l’environnement. » [traduction libre]

- Dr. Donald Baird, Ph. D., chercheur scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada

Les débuts d’un modèle hydraulique

Hazen Russell est chercheur à la Commission géologique du Canada de Ressources naturelles Canada. Lui et Steve Frey, Ph. D., d’Aquanty Inc., dirigent l’élaboration de la prochaine génération d’outils prédictifs qui permettront de démontrer les impacts des changements climatiques et des changements à l’échelle du paysage sur les services écologiques offerts par les ressources que sont les eaux souterraines et les eaux de surface. L’un des objectifs est d’aider les agriculteurs et les autres intendants des terres à réagir aux menaces comme la sécheresse et les effets des précipitations excessives avant qu’elles ne se concrétisent.

« Dans de nombreuses régions, les eaux souterraines constituent la source d’eau la plus accessible pour faire de l’irrigation agricole ou abreuver le bétail » [traduction libre], explique Hazen. En peaufinant un modèle mis au point et utilisé par la Conservation de la Nation Sud à des fins de gestion des ressources des bassins versants, leurs travaux de modélisation aident déjà les producteurs et les gestionnaires des bassins versants à mieux comprendre comment les ressources en eau sont menacées et comment les gérer de manière proactive. Il ne s’agit que d’un aspect. L’équipe a accompli de grands progrès dans la prédiction non seulement de la dynamique des ressources hydriques, mais aussi des concentrations de pathogènes et de produits agrochimiques dans ces bassins en temps réel.

Les travaux de l’équipe dans le bassin versant de la Nation Sud ont également servi de base à un autre projet connu sous le nom de Canada1Water (C1W). Également dirigé par Hazen et Steve, C1W est l’un des systèmes d’outils décisionnels basés sur l’hydroclimat les plus importants et les plus complets que l’on a mis au point à ce jour, et ce, pour l’ensemble du Canada.

« Les projets ECO2 et C1W sont reliés du fait qu’ils visent à comprendre le rôle des eaux souterraines dans un bassin versant agricole » [traduction libre], explique Hazen. Les chercheurs ont pu mieux comprendre les services écologiques fournis par les eaux souterraines, comme le soutien des cultures, la purification de l’eau, le recyclage des éléments nutritifs et l’atténuation des effets des inondations et de la sécheresse sur les cultures.

« À titre d’exemple, chaque année, dans le bassin versant de la Nation Sud, Steve et son équipe d’ECO2 ont estimé que la valeur des eaux souterraines sur le plan des services écologiques était de plus de 300 millions de dollars en avantages pour les humains et les écosystèmes, et ce, uniquement pour un bassin de 4 000 km² » [traduction libre], ajoute David. « Cette valeur dépasse les 400 millions de dollars dans les années de sécheresse. Nous devrions valoriser un peu plus les eaux souterraines et les protéger. » [traduction libre]

Les avantages peuvent être considérables

Donald Baird et son équipe d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) étudient les répercussions des activités agricoles sur les services écologiques rendus à la faune dans les fossés agricoles et aux alentours.

« Nous pensons que ces humbles fossés sont très importants », explique-t-il, « non seulement pour la biodiversité, mais aussi parce que la faune elle-même peut fournir d’importants services écologiques aux agriculteurs. » [traduction libre]

Les fossés abritent des insectes aquatiques qui constituent une source de nourriture essentielle pour les oiseaux nicheurs, notamment les parulines et les hirondelles bicolores dont les effectifs diminuent rapidement au Canada et dans le monde entier. Ces oiseaux dépendent de systèmes de fossés pour fournir aux jeunes à l’envol des nutriments essentiels comme des acides gras essentiels, et la végétation riveraine environnante offre des zones ombragées où les oiseaux peuvent se percher et chercher de la nourriture.

En collaboration avec Greg Mitchell, un collègue d’ECCC, l’équipe de recherche a installé des nichoirs pour évaluer comment des activités agricoles affectent la santé des jeunes hors du nid. L’équipe étend par ailleurs son étude à l’observation des changements qui se produisent au niveau des algues, des poissons et du réseau alimentaire de l’écosystème. Des écosystèmes sains peuvent soutenir les prédateurs naturels des ravageurs de cultures, protéger les pollinisateurs et réduire la pollution causée par les concentrations excessives de nutriments. La protection de la biodiversité et la productivité agricole peuvent aller de pair.

« Nous cherchons à réduire au minimum les pratiques d’intervention les plus extrêmes tout en aidant les agriculteurs à continuer à profiter des avantages du paysage, c’est-à-dire en permettant à la faune de prospérer dans les habitats offerts par les lisières de champs. » [traduction libre]

- Dr. Donald Baird, Ph. D., chercheur scientifique, Environnement et Changement climatique Canada

Modélisation de maladies vectorielles

Nicholas Ogden et son équipe de l’Agence de santé publique du Canada mettent au point des outils qui soutiendront la prévision du risque de maladies transmises par les moustiques, comme le virus du Nil occidental, qui sont influencées par les changements climatiques et les changements d’utilisation des terres.

« L’abondance des moustiques et des hôtes animaux qui maintiennent l’infection dans la nature dépend du paysage et de l’habitat » [traduction libre], explique-t-il.

Par exemple, un environnement comportant plus d’arbres peut être plus frais, ce qui ralentit les activités de piqûre et de reproduction des moustiques. Les paysages gérés de manière moins intensive et présentant une végétation plus diversifiée semblent favoriser les espèces d’oiseaux qui ne peuvent pas transmettre le virus du Nil occidental.

« Il [le projet] nous amènent à mieux comprendre les facteurs environnementaux qui permettent de déterminer où et quand l’on trouve beaucoup de moustiques capables de transmettre le virus du Nil occidental ou d’autres maladies et comment ceci se produit » [traduction libre], explique‑t‑il. Les arbres et les plantes, la structure des sols et la météo – ce sont tous des facteurs déterminants.

En analysant les différents moustiques et oiseaux qui visitent le site d’ECO2 et en combinant ces informations avec les données environnementales du plus grand groupe, leurs modèles prédictifs aideront à prévoir les risques de maladie en fonction de changements environnementaux (par exemple, les changements climatiques) et d’autres activités humaines (par exemple, l’urbanisation).

« Le capital naturel a une incidence considérable sur le risque de contracter les maladies auxquelles nous sommes exposés, et la façon dont nous le modifions a une incidence sur les risques de contracter une maladie » [traduction libre], explique-t-il.

« Une seule santé » pour des solutions multidisciplinaires

En collaborant, les chercheurs peuvent mettre en commun leurs ressources et leurs données, tout en partageant leur expertise et en proposant des solutions globales qui abordent les problèmes sous tous les angles.

L’idée derrière « Une seule santé » est que la santé de l’environnement, la santé humaine et la santé de la faune sont interdépendantes, explique Nick. « Nous espérons qu’il s’agit d’un modèle pour l’avenir, car nous comprenons les grands défis que posent les changements climatiques et la nécessité de maintenir le capital naturel qui nous protège et nous nourrit avec des aliments de qualité, de l’eau propre, de l’air pur et une absence de risques de contracter des maladies. »

Ensuite, les chercheurs s’emploieront à mettre en place de nouveaux sites d’ECO2 pour mieux comprendre les paysages agricoles de l’ensemble du Canada.

« Quelles sont les caractéristiques de ces paysages qui optimiseront les principaux services écologiques qui nous intéressent? » [traduction libre], demande David.

Que ce soit au profit de la santé environnementale, humaine ou animale, cette équipe de recherche ne ménage aucun effort pour protéger et renforcer la résilience des paysages agricoles.

Faits en bref

  • En s’appuyant sur l’expertise de plusieurs ministères fédéraux et intervenants du secteur, l’Observatoire « Une seule santé » face aux changements environnementaux crée des pratiques globales de gestion durable des agroécosystèmes qui non seulement profitent aux agriculteurs, mais qui améliorent également la santé de l’environnement, des humains et des animaux.
  • Cet observatoire fait usage des ressources naturelles offertes par les agroécosystèmes, appelées « capital naturel » (par exemple, l’eau, le sol, l’air) et se concentre sur les caractéristiques du paysage naturel comme les milieux humides, les bandes riveraines et les limites forestières.
  • En combinant leurs efforts, les participants au projet et les chercheurs sont en mesure de tirer des conclusions à partir d’un trésor de données et de créer des outils prédictifs pour la prochaine génération afin d’aider les agriculteurs et les décideurs à intervenir de manière proactive.
  • Dirigé par Agriculture et Agroalimentaire Canada, ECO2 suscite la participation de plusieurs ministères et organismes fédéraux, dont ECCC, l’Agence de santé publique du Canada, Pêches et Océans Canada, l’Agence canadienne d’inspection des aliments, Ressources naturelles Canada et le Musée canadien de la nature.

Galerie de photos

Un fossé dénudé présentant un sol brun des deux côtés.
Dans le cadre de l’une des principales activités du projet ECO2, l’équipe a nettoyé et dragué quelques fossés afin de mettre à l’essai le scénario de la pire éventualité pour la biodiversité, à savoir un paysage agricole dépourvu de capital naturel.
Le même fossé végétalisé des deux côtés.
Cette photo prise 2 ou 3 ans après le nettoyage de la zone montre comment le fossé perturbé a commencé à récupérer au fil du temps.
Un chercheur prélève des échantillons dans le fossé.
L’observatoire permet aux chercheurs de faire des observations et de recueillir des données en continu, et de mieux comprendre ainsi comment les services écologiques sont impactés par les changements climatiques et les activités humaines.

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