Mise au point de techniques de confusion sexuelle pour la lutte intégrée contre la tordeuse de la vigne

Code de projet : PRR07-230

Chef de projet

Robert Trimble - Agriculture et Agroalimentaire Canada

Objectif

Déterminer si la réduction des taux d'application des diffuseurs de phéromone au moyen de traitements périphériques peut servir à exercer un contrôle efficace et économique de la tordeuse de la vigne (TV). Mener une analyse coût-avantage de cette technologie de réduction des taux d'application

Sommaire des Résultats

Contexte

La tordeuse de la vigne (Paralobesia viteana [Clemens]) est le plus important insecte ravageur de la vigne dans l’est de l’Amérique du Nord. Cet insecte connaît deux ou trois générations par année au Canada. La lutte contre cet organisme nuisible repose en grande partie sur l’utilisation des pesticides. Dans les vignobles de la péninsule de Niagara, une ou deux applications d’insecticides organophosphorés suffisaient habituellement pour combattre ce ravageur. Cependant, l’homologation de ces insecticides a été révoquée, ou leur utilisation est devenue plus difficile en raison de la Food Quality Protection Act des États-Unis et d’un programme de réévaluation des pesticides au Canada. Les autorités américaines et canadiennes ont étudié l’efficacité des insecticides à risque réduit pour remplacer les insecticides organophosphorés. Toutefois, de plus amples travaux de recherche et de développement s’imposaient pour trouver des solutions de rechange contre le P. viteana.

L’usage de phéromones sexuelles synthétiques pour perturber l’orientation sexuelle, processus autrement connu sous le nom de « confusion sexuelle », est une méthode de lutte de rechange qui peut permettre la transition de la lutte chimique à la lutte intégrée. Cette technique a donné de bons résultats dans les vignobles de l’Ontario, mais son adoption par les producteurs demeure limitée. Le coût plus élevé des phéromones par rapport à celui des insecticides est en grande partie responsable de ce faible taux d’adoption. Les diffuseurs de phéromones Isomate GBMMD Plus constituent le seul produit commercial de confusion sexuelle que les viticulteurs peuvent actuellement se procurer sur le marché au Canada. L’une des façons de réduire le coût de la lutte reposant sur la technique de confusion sexuelle serait d’employer des diffuseurs de phéromones à doses réduites.

Méthodes

En 2007, on a étudié l’effet contre le P. viteana de traitements avec des diffuseurs de phéromones installés en périphérie de trois vignobles commerciaux de la péninsule de Niagara, en Ontario. On a délimité quatre parcelles de 1 hectare dans chacun des trois vignobles. On a installé des 25 pièges delta (Cooper Mill Ltd., Madoc [Ontario]) contenant des phéromones sexuelles synthétiques à 1 m du sol sur une grille de 20 m x 20 m avant le vol de la première génération de la tordeuse de la vigne au printemps pour surveiller l’activité et mesurer la capacité des P. viteana mâles à chercher et à trouver des partenaires. Chaque piège a été appâté au moyen d’un bouchon-manchon en caoutchouc naturel de 9 mm de diamètre (Chromatographic Specialties, Brockville, Ontario), rempli de 0,8 mg de Z-acétate de dodéc-9-ényl (Z9-12:OAc) et 0,2 mg de (Z)-11-tétradécenal (Z11-14:OAc) (Pherobank, Plant Research International, Wageningen, Pays-Bas). On a compté le nombre de ravageur et on les a retirés des pièges le lundi et le jeudi, du 22 mai jusqu’au 10 septembre 2007. Les bouchons ont été changés à la fin de la période de vol de la première et de la deuxième des trois générations de P. viteana.

Les diffuseurs Isomate® GBM Plus contenant chacun 221,5 mg de Z9-12:OAc (Pacific Biocontrol Corp., Vancouver, Washington) ont été déployés après le pic de prises dans les pièges pendant le vol de la deuxième génération (entre le 6 et le 11 juillet) de tordeuses de la vigne P. viteana. Dans chaque vignoble, chacune des quatre parcelles a fait l’objet de l’un ou l’autre des traitements suivants : 1) diffuseurs de phéromones répartis à distance égale partout la parcelle a la densité recommandée de 500 unités/hectare; 2) diffuseurs installés en périphérie des parcelles, à intervalles de 5 m; 3) diffuseurs installés en périphérie des parcelles, à intervalles de 2,5 m; 4) aucun traitement avec des diffuseurs de phéromones (parcelle témoin). Les diffuseurs ont été installés au sommet des treillis à une hauteur de 110 à 120 cm au-dessus du sol dans le feuillage de la vigne. On a compté le nombre de P. viteana adultes capturés dans chaque parcelle avant et après l’installation des diffuseurs, et l’on a évalué les dommages infligés aux grappes de raisins par les chenilles.

Résultats

L’installation de diffuseurs Isomate® GBM Plus à la densité de 500 unités/hectare a réduit de 96 p. 100 le nombre total moyen d’adultes capturés par rapport a les parcelles témoin. Ce résultat témoigne d’un degré élevé de confusion sexuelle. On a constaté une diminution de 87 p. 100 du nombre d’adultes piégés lorsque les diffuseurs ont été installés à intervalles de 2,5 ou 5 m le long du périmètre des parcelles de vigne de 1 hectare, mais la différence par rapport à la parcelle témoin n’était pas significative. Le seuil économique de dommages, soit 2 p. 100 des grappes de raisin infestées, n’a été dépassé dans aucune des parcelles étudiées. Les résultats de cette étude démontrent que l’installation de diffuseurs de phéromones en périphérie des vignobles pour lutter contre le P. viteana à l’aide de la technique de confusion sexuelle peut être une stratégie efficace. D’autres études comportant un niveau de répétition plus élevé s’imposent pour corroborer les résultats obtenus à ce jour et accroître la probabilité de détecter des effets significatifs en cas de recours à des traitements en périphérie. Des essais devraient également être réalisés avec des femelles vierges attachées de manière à ce qu’on puisse confirmer que les traitements aux phéromones affectent la capacité des P. viteana de trouver des femelles sexuellement réceptives et de s’accoupler avec succès. Les résultats convaincants des traitements fondés sur l’installation de diffuseurs de phéromones en périphérie des vignobles permettraient d’abaisser considérablement le coût, pour les viticulteurs, de l’utilisation de phéromones contre le ravageur. Par exemple, pour un vignoble de 10 hectares mesurant 200 m de largeur sur 500 m de longueur, l’installation de diffuseurs à tous les 2,5 ou 5 m autour de ‘sou-parcelles’ de 1 hectare dans le vignoble permettrait de réduire de 78 et de 89 p. 100, respectivement, le nombre de diffuseurs requis par rapport à la dose d’application minimale recommandée, soit 500 diffuseurs/hectare.