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De nombreux producteurs canadiens ont recours au travail du sol, c’est-à-dire retourner la terre dans leurs champs, pour préparer la plantation de cultures telles que la pomme de terre. Le travail du sol est, à certains égards, une arme à double tranchant. L’intensification du travail du sol peut contribuer à réduire les maladies du sol, mais trop travailler la terre peut aussi avoir pour effet de faire pousser davantage les mauvaises herbes et de détériorer la qualité du sol, le rendant plus vulnérable à l’érosion ou réduisant le rendement des cultures. Il s’agit pour les producteurs de trouver le juste équilibre.
L’énigme du travail du sol
La recherche d’équilibre : voilà pourquoi Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, et des producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard ont consacré quatre années à l’étude ainsi qu’à la mise à l’essai de méthodes de travail du sol dans le cadre du projet Laboratoire vivant – Atlantique, qui vient de s’achever. Il s’agit d’une collaboration au cours de laquelle des producteurs et des scientifiques ont élaboré des solutions novatrices et les ont mises à l’essai dans de vrais champs agricoles en vue d’accroître l’adoption de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement.
« Les plants de pommes de terre ont un système racinaire peu profond et, pour protéger ces racines, les producteurs entassent souvent de la terre autour du plant, une pratique appelée rechaussage. Ce travail du sol oblige les producteurs à labourer leurs champs de pommes de terre avant de les planter ».
– Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
La méthode classique de travail du sol, désignée sous le nom de labour en planche, permet de retourner efficacement le sol, tandis que les résidus à la surface sont enfouis à une profondeur de 20 à 25 centimètres. Non seulement cette méthode exige beaucoup de travail et coûte cher en carburant, mais elle peut aussi réduire la qualité du sol et le rendement des pommes de terre. En adoptant l’approche collaborative de l’innovation des laboratoires vivants, Mme Nyiraneza, son équipe et des producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard souhaitaient comparer le labour en planche avec une pratique de gestion des sols régénératrice, désignée sous le nom de travail des résidus ou travail du sol superficiel sans inversion. La méthode par travail des résidus consiste à couper les résidus en petits morceaux et à les répartir dans le sol tout en laissant une partie des résidus à la surface, ce qui contribue à réduire l’érosion du sol et à retenir l’humidité dans le sol.
Plusieurs producteurs participant au projet Laboratoire vivant – Atlantique avaient déjà acheté du matériel pour le travail des résidus, mais ne savaient pas trop comment il allait se comparer à leur matériel de labour en planche.
« Cette activité de recherche a été principalement élaborée et dirigée par les producteurs participant au projet Laboratoire vivant – Atlantique, et c’est l’une des nombreuses activités qui se sont déroulées exclusivement dans des champs commerciaux. Nous avons axé la recherche sur les besoins des producteurs », explique Mme Nyiraneza.
Andrew Lawless, propriétaire de Hilltop Produce, à Kinkora (Île-du-Prince-Édouard), a été l’un des premiers à acheter du matériel pour le travail des résidus, avant même le lancement du projet Laboratoire vivant – Atlantique en 2018.
« Nous cherchions différents moyens de conserver les sols. L’utilisation et l’entretien de la charrue à versoirs coûtait cher, et j’ai entendu parler par notre fournisseur des avantages possibles du matériel de travail des résidus sur la santé des sols », explique M. Lawless.
« Puis, une fois le projet Laboratoire vivant – Atlantique lancé, nous avons voulu obtenir des données concrètes pour appuyer ces avantages; d’autres producteurs qui n’avaient pas encore acheté de matériel pour le travail des résidus avaient hâte de voir les résultats. »
Mme Nyiraneza et les producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard participants, dont M. Lawless, ont comparé les deux méthodes de travail du sol dans 14 champs agricoles commerciaux de 2019 à 2022 et ont évalué leur incidence à court terme. Les chercheurs et les producteurs ont travaillé ensemble pour mettre en place les parcelles sur des terres agricoles réelles. M. Lawless explique que les questions des producteurs restées sans réponse ont incité ceux-ci à planter des variétés de pommes de terre plus vulnérables à la gale commune, une maladie dont les signes sont des lésions surélevées et rugueuses à la surface des pommes de terre.
« À l’époque, on pensait que le travail des résidus provoquait plus souvent la gale commune de la pomme de terre. Nous voulions voir comment cela se traduisait dans la recherche. »
Le travail du sol a eu lieu à l’automne, suivi de la plantation des pommes de terre au printemps suivant, tout en étudiant les caractéristiques de la santé du sol.
« Après une saison de croissance seulement, et au cours des saisons suivantes, nous avons constaté des signes d’amélioration de la santé du sol dans toutes les mesures, y compris la respiration du sol, le carbone actif, la stabilité des agrégats du sol et la disponibilité de l’azote pour les cultures soumises à la méthode par travail des résidus par rapport au labour en planche. La méthode par travail des résidus n’a pas eu non plus eu d’incidence négative sur le rendement des pommes de terre. »
– Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
La réduction du travail du sol sur les maladies de la pomme de terre
Pendant les quatre années qu’a duré le projet, les observations de Mme Nyiraneza et des producteurs ont permis de déterminer que le travail des résidus est bénéfique pour la santé des sols. Mais quelle influence cette méthode a-t-elle sur les maladies? Scientifiques chez AAC, Rick Peters, à l’Île-du-Prince-Édouard, et Dahu Chen, au Nouveau-Brunswick, ont travaillé avec des producteurs pour donner suite à l’idée originale de M. Lawless d’étudier l’incidence du travail du sol sur les maladies touchant la pomme de terre. M. Peters a comparé les effets du travail des résidus et du labour en planche sur la gale commune, tandis que M. Chen a étudié leurs effets sur la mortalité précoce, une maladie fongique qui entraîne une perte de rendement des pommes de terre.
Sur les dix champs étudiés par M. Peters, aucun type de travail du sol n’a eu d’effet sur l’incidence ou la gravité de la gale commune dans six champs. Dans trois champs, la gale commune a légèrement augmenté avec la méthode par travail des résidus.
« Si les pratiques de travail du sol peuvent influencer l’incidence et la gravité des maladies transmises par le sol à la pomme de terre, d’autres facteurs influencent ce phénomène et feront l’objet d’études plus approfondies. Il s’agit notamment des cultures précédentes, des pratiques d’irrigation, du type de variété de pommes de terre plantée et de la santé du sol. »
- Rick Peters, chercheur scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
M. Chen a comparé les deux méthodes de travail du sol pour comprendre leurs effets sur les niveaux de population du champignon du genre Verticillium et des nématodes des lésions des racines qui, ensemble, peuvent entraîner la mortalité précoce de la pomme de terre, de même que sur le taux d’atteinte. Il a constaté que les niveaux de Verticillium étaient plus élevés au printemps avec le travail des résidus qu’avec le labour en planche. Toutefois, ces niveaux plus élevés ont diminué pour ramener la maladie au taux moyen au cours de la durée de la saison de croissance. La pratique de travail du sol n’a pas eu beaucoup d’influence sur les populations de nématodes des lésions des racines. Après la récolte des pommes de terre à l’automne, il n’y avait pas de différences importantes quant aux taux d’atteinte entre la méthode par travail des résidus et le labour en planche. Les méthodes de travail du sol n’ont pas eu d’incidence sur la gravité de la mortalité précoce de la pomme de terre.
Même si la méthode par travail des résidus n’a pas permis de réduire considérablement les taux d’atteinte ni la gravité des maladies, M. Chen est persuadé que les avantages qu’offre la méthode par travail des résidus pour la santé du sol représentent un incitatif suffisant pour que les producteurs adoptent cette méthode plutôt que le labour en planche.
« La méthode par travail des résidus est une pratique optimale, car elle améliore la santé générale du sol, ce qui est essentiel pour les producteurs. Et si les producteurs peuvent gérer la santé de leur sol à long terme, les productions agricoles peuvent devenir plus durables. »
– Dahu Chan, chercheur scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
M. Lawless est d’accord avec l’évaluation de M. Chen.
« Les essais de recherche réalisés dans mon exploitation agricole m’ont permis de constater une augmentation du rendement des pommes de terre, une diminution de l’érosion du sol et une meilleure rétention de l’humidité dans le sol grâce au travail des résidus. »
L’avenir de la recherche et de l’innovation en matière de travail du sol
Par rapport au labour en planche, des recherches antérieures ont montré que le travail des résidus permettait de réduire la consommation d’énergie par hectare des producteurs, de même le temps d’utilisation de leurs tracteurs. Aujourd’hui, puisqu’ils connaissent mieux les avantages pour la santé du sol et les effets minimes sur les maladies, de nombreux producteurs ont investi dans l’achat de matériel pour le travail des résidus, du moins à l’Île-du-Prince-Édouard.
« Je vois beaucoup d’autres producteurs adopter la méthode par travail des résidus grâce au projet Laboratoire vivant – Atlantique. Nous faisons passer le message », affirme M. Lawless.
Le rendement des investissements peut être rapide, si l’on en croit les données que M. Lawless a recueillies et les résultats du projet de laboratoire vivant. « Du point de vue des coûts, c’est un avantage indéniable. Il suffit aux producteurs de constater l’augmentation du rendement qu’il offre. De plus, la méthode par travail des résidus permet de couvrir plus de terrain, en moins de temps - c’est déjà un pas dans la bonne direction. »
L’adoption de la méthode par travail des résidus continue de progresser grâce à la collaboration entre Mme Nyiraneza, M. Peters et M. Chen, et les producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard.
« Au début du projet Laboratoire vivant – Atlantique, les producteurs voulaient savoir si le travail des résidus était bénéfique pour leur sol, et je suis convaincue que les réponses à leurs questions sont affirmatives : cette méthode a permis d’améliorer le sol et d’obtenir des avantages économiques, tout en réduisant les coûts en énergie et en temps précieux par rapport au labour en planche. »
– Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique, Agriculture et Agroalimentaire Canada
Comme la recherche agricole est en constante évolution, Mme Nyiraneza et les producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard comptent s’intéresser aux changements climatiques. Ils continueront de mettre à l’essai la méthode par travail des résidus pour établir sa capacité de séquestrer le carbone et de réduire les émissions de gaz à effet de serre au cours du prochain projet Laboratoire vivant – Î.-P.-É. dans le cadre du programme Solutions agricoles pour le climat d’AAC.
Principales découvertes et avantages importants
- Judith Nyiraneza, chercheuse scientifique chez AAC, et des producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard ont passé quatre ans à étudier et à mettre à l’essai des méthodes de travail du sol dans le cadre du projet Laboratoire vivant – Atlantique, qui vient de s’achever.
- La méthode classique de labour en planche consiste à retourner la terre, tandis que les résidus à la surface sont enfouis à une profondeur de 20 à 25 centimètres. Les participants souhaitaient comparer cette méthode à la méthode par travail des résidus ou au travail du sol superficiel sans inversion. La méthode par travail des résidus consiste à couper les résidus en petits morceaux et à les répartir dans le sol tout en laissant une partie des résidus à la surface, ce qui contribue à réduire l’érosion du sol et à retenir l’humidité dans le sol.
- Après une saison de croissance seulement, Mme Nyiraneza et les producteurs participants ont constaté que la méthode par travail des résidus avait permis d’améliorer les propriétés du sol par rapport au labour en planche. La méthode par travail des résidus n’a pas eu non plus d’incidence négative sur le rendement des pommes de terre.
- M. Peters a comparé les effets de la méthode par travail des résidus et ceux du labour en planche sur la gale commune, caractérisée par des lésions surélevées et rugueuses à la surface des pommes de terre. M. Chen a étudié leurs effets sur la mortalité précoce, une maladie fongique qui entraîne une perte de rendement des pommes de terre.
- Sur les dix champs étudiés par M. Peters, aucun type de travail du sol n’a eu d’effet sur l’incidence ou la gravité de la gale commune dans six champs. La gale commune a augmenté avec la méthode par labour en planche dans un seul champ, alors qu’elle a augmenté avec la méthode par travail des résidus dans trois champs.
- Même si la méthode par travail des résidus n’a pas permis de réduire considérablement les taux d’atteinte ni la gravité de la mortalité précoce, M. Chen est persuadé que les avantages pour le sol qu’offre la méthode par travail des résidus représentent un incitatif suffisant pour que les producteurs adoptent cette méthode par rapport au labour en planche.
- Selon un producteur participant, beaucoup de ses collègues ont investi dans l’achat de matériel pour le travail des résidus, du moins dans l’Île-du-Prince-Édouard, et l’adoption de la méthode progresse grâce à la collaboration entre Mme Nyiraneza, M. Peters, M. Chen et les producteurs de l’Île-du-Prince-Édouard.