Une histoire de brasseur : comment Jason McCallum, chercheur d’AAC, transforme le houblon sauvage des Maritimes en une bière unique et délicieuse

Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard, est l’endroit rêvé pour les amateurs de bière artisanale, avec ses nombreux pubs et restaurants qui servent les produits de huit microbrasseries locales. Toutefois, selon Jason McCallum, chercheur à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), la meilleure bière de la ville se trouve à un endroit un peu plus exclusif.

Jason McCallum et son collègue Aaron Mills font partie d’une équipe de chercheurs d’AAC qui ont adapté le houblon sauvage cultivé dans les Maritimes pour en faire une bière artisanale. Ce projet utilise le houblon indigène de la côte est et intègre la passion de Jason pour la chimie des plantes.

« Certaines des meilleures bières se trouvent dans le sous-sol d’Aaron, raconte-t-il. On l’appelle le bar clandestin “Le trou dans le mur”, parce qu’il y a un trou dans sa fondation où il a ajouté une annexe, et vous devez traverser un petit trou qui conviendrait tout juste à un hobbit jusqu’à la pièce du fond où il a installé ses robinets de bière. »

Jason McCallum dans le laboratoire.
Jason McCallum dans le laboratoire. (Photo fournie par Jason McCallum.)

Jason a grandi sur une ferme à Woodstock, en Ontario, où sa famille cultivait des pommes, des haricots verts et jaunes, du maïs sucré et des choux. Son intérêt pour l’horticulture a commencé dès son plus jeune âge. « Les plantes sont de formidables petites usines chimiques, qui produisent des centaines et des centaines de choses. Ainsi, si vous mangez une baie fraîche, vous ne consommez pas un seul produit phytochimique, mais des centaines », explique-t-il. Alors qu’il terminait son diplôme de premier cycle à l’Université de Waterloo, il s’est concentré sur les sciences végétales et a effectué trois stages coopératifs à AAC. Cela l’a amené à travailler dans un laboratoire d’AAC pendant son doctorat à l’Université de Guelph, puis à y travailler à temps plein comme chercheur.

« C’est comme faire un casse-tête, dit-il en parlant de son travail avec les plantes. Vous pouvez obtenir certains éléments d’information à partir de certains outils et vous pouvez assembler le tout comme un casse-tête logique pour comprendre ce à quoi vous avez affaire. Vous êtes toujours au bord de l’inconnu, et vous découvrez toujours de nouvelles choses. »

« J’aime élucider les mystères. C’est ce qui me pousse à poursuivre mes recherches. »
- Jason McCallum, Ph.D., Chercheur scientifique en phytochimie, Agriculture et Agroalimentaire Canada

Des leçons de la population locale

Lorsque Jason a déménagé du sud de l’Ontario à l’Île-du-Prince-Édouard, il n’était pas vraiment amateur de bière. Cela a changé lorsqu’il a rencontré un autre chercheur, Aaron Mills, qui faisait du brassage à domicile.

Leur recherche a débuté sous la forme d’un projet visant à examiner la diversité du houblon sauvage, qui, selon Jason, est présent partout dans les Maritimes. À l’extérieur des centres urbains, ou même lorsqu’il se trouvait tout simplement en voiture, il pouvait repérer un plant de houblon poussant le long d’un poteau de téléphone. « S’il y a du houblon sauvage qui pousse ici dans les Maritimes, et qu’il se porte très bien sans aucune sorte d’intervention humaine, pourquoi avons-nous tant de mal à cultiver des variétés commerciales? » a-t-il pensé.

À partir de là, l’équipe a reçu des fonds pour approfondir ses recherches sur la capacité du houblon sauvage de pousser dans une houblonnière commerciale. Armée seulement de quelques vieux guides sur la flore indigène de l’Île-du-Prince-Édouard (coordonnées GPS non incluses), l’équipe a trouvé des conseils auprès de gens de la région qui avaient entendu parler du projet par les médias et qui savaient où poussait le houblon. Selon Jason, en trois ans, ils ont trouvé une centaine de populations sauvages en pleine croissance, dont la moitié environ a été suggérée par le public.

deux hommes debout près d’un grand arbre couvert de houblon sauvage.
Jason et Aaron Mills avec des pousses de houblon sauvage

Les sorties sur le terrain pour trouver ce houblon sauvage étaient beaucoup plus trépidantes que de passer l’après-midi dans un laboratoire. « On devait se frayer un chemin dans la broussaille », se souvient Jason. Au bout d’un certain temps, l’équipe a commencé à développer un « sixième sens » pour savoir où pousserait le meilleur houblon, et ses recherches l’ont amenée à quitter l’île et à parcourir les Maritimes.

De la houblonnière au verre

Selon Jason, une houblonnière ressemble à « un vignoble sur des stéroïdes ». Les plantes sont maintenues en place par des poteaux, mais elles s’élèvent à six mètres dans les airs. Jason et son équipe s’adressent au marché plus petit et plus innovant des brasseurs artisanaux et domestiques en offrant des produits uniques – les brasseurs artisanaux sont toujours à la recherche de nouvelles saveurs qui attirent l’attention, et la mangue, le citron et la gomme à mâcher ne sont que quelques-unes des saveurs que Jason a rencontrées dans les Maritimes.

Quelles sont les qualités qui font qu’une variété de houblon est bonne pour la bière artisanale? Selon Jason, il s’agit de trouver un équilibre entre le rendement, la performance et la nouveauté de la saveur. « Nous recherchons la diversité des saveurs, une sorte de niche qui serait unique, mais en fin de compte, si le houblon ne produit pas beaucoup de cônes ou ne génère pas un bon rendement ou ne pousse pas très bien dans le champ, il ne peut pas être commercialisé. On doit essayer d’équilibrer ces deux facteurs.  »

Défis et possibilités

La recherche sur le houblon a été couronnée de succès, mais l’équipe a dû relever certains défis. Normalement, les Maritimes connaissent beaucoup de pluie et une forte humidité, mais ces dernières années ont été si anormalement sèches que l’équipe a dû irriguer elle-même la houblonnière. Puis, en 2019, l’ouragan Dorian a frappé la côte est à un niveau 1, brisant environ la moitié des poteaux de la houblonnière.

Les réparations étaient prévues pour le printemps 2020, puis la COVID a frappé. « Au printemps 2020, il n’y avait pas de houblonnière. Il n’y avait que du houblon qui poussait dans les mauvaises herbes, il n’y avait pas de supports sur lesquels les plantes pouvaient grimper. Effectivement, les dernières années ont été difficiles pour nous », dit Jason.

Malgré les revers, Jason et son équipe persévèrent et voient un bel avenir pour leur travail. À partir d’avril 2022, ils entameront de nouvelles recherches visant à déterminer comment l’extrait de houblon d’origine commerciale peut être utilisé comme biopesticide.

Entre-temps, les chercheurs eux-mêmes profitent occasionnellement des fruits de leur labeur. Quel est le moment préféré de Jason pour déguster une bière? « C’est sans aucun doute les séances de remue-méninges du vendredi après-midi avec des collègues de travail. C’est comme une conférence scientifique où le travail de la journée est terminé et où l’on peut parler à des personnes partageant les mêmes intérêts et échanger des idées folles », révèle-t-il.

Sa bière idéale, officiellement, serait une IPA. « Les gens disent parfois que mes papilles gustatives sont défectueuses; j’aime tout ce qui est très, très amer, raconte-t-il en riant. Plus c’est houblonné, mieux c’est. »

 

Plus d’Agri-info

  • Vous voulez plus d'histoires comme celles-ci? Découvrez tout ce qu'Agri-info a à vous offrir.
  • Vous souhaitez faire un reportage sur l'une de nos histoires? Communiquez avec l’équipe des Relations avec les médias d'AAC à l'adresse aafc.mediarelations-relationsmedias.aac@aac@agr.gc.ca pour obtenir une entrevue avec l'un de nos experts.
  • Vous avez une idée d'histoire ou des commentaires à partager? Communiquez avec nous à l'adresse aafc.agri-info.aac@aac@agr.gc.ca!
  • Soyez à l'affût. Abonnez-vous à Agri-info dès aujourd'hui.