Pour l’amour du blé : les recherches sur le blé à travers le monde de Samia Berraies et la lutte contre les maladies génétiques

Certaines personnes mettent une vie à trouver l’emploi de leurs rêves. Il leur faut des années pour découvrir les choses qu’elles aiment faire, et parfois même plus si elles souhaitent les transposer dans leur carrière. Pour Samia Berraies, chercheuse scientifique au Centre de recherche et de développement de Swift Current, en Saskatchewan, ce fut tout le contraire. Elle savait dès son plus jeune âge qu’elle voulait travailler avec le blé.

Samia Berraies (Ph. D.) tenant du blé, sa passion dans la vie.

Une étude sur le blé

« Le blé est ma passion, dit Samia. J’ai grandi en Tunisie, qui était le grenier à blé de l’Empire romain. Vous pouvez même voir que le blé est intégré aux mosaïques de l’époque. J’ai grandi en regardant ma famille cuisiner avec du couscous, du boulgour et des pâtes. Pour moi, le blé est synonyme de nourriture, d’histoire et de culture. »

Samia a ensuite entrepris une carrière scientifique. Pendant que ses camarades de classe s’intéressaient à la génétique humaine, elle ne pouvait tout simplement pas s’arrêter de penser au blé. « On oublie souvent les plantes, contrairement aux humains ou aux animaux. Mais elles sont très importantes. L’impact des cultures sur le monde est énorme! »

Le blé est devenu sa plante de choix, car Samia a toujours été étonnée par ses propriétés physiques et génétiques. Elle adorait sa polyvalence et sa contribution à la sécurité alimentaire.

Samia a obtenu un doctorat spécialisé en génétique et en pathologie du blé (l’étude des maladies). En se concentrant sur la pathologie moléculaire, elle a pu comprendre les maladies sur le plan génétique et comment elles interagissent avec les plantes hôtes. « Je voulais guérir le blé pour garder les plantes en santé! », dit-elle.

À la fin de ses études, Samia a posé sa candidature au prix Jeanie Borlaug Laube Women in Triticum Early Career Award (en anglais seulement) de l’Université Cornell. Ce prix reconnaît les réalisations des femmes qui travaillent dans le domaine du blé au début de leur carrière. Sa passion et son amour du blé ont fait d’elle la candidate idéale, et elle a accepté son prix en 2013.

Le hasard a fait qu’un chercheur d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) était assis à côté d’elle à la cérémonie de remise du prix.

Samia explique les bases du blé à des écoliers.

Il est où le blé, il est où?

Samia s’est toujours demandé où, sur le globe, sa carrière la mènerait. Les possibilités étaient nombreuses, mais un seul endroit lui sautait aux yeux : « Où est le blé? Il est au Canada! »

Lorsque le chercheur d’AAC lui a parlé des travaux qui étaient menés au centre de recherche de Swift Current, la prochaine étape de sa carrière est alors devenue évidente. Samia voulait aider à stopper la propagation des maladies du blé, et Swift Current, l’épicentre de la production canadienne de blé, serait un endroit de rêve pour elle.

À ce moment-là, la région de Swift Current était frappée par une éclosion de fusariose de l’épi (brûlure de l’épi causée par le fusarium). Samia pouvait donc miser sur ses connaissances en pathologie moléculaire. Cette maladie est particulièrement difficile à traiter, car le mécanisme de résistance génétique du blé à cette maladie est très complexe. Cette résistance est contrôlée par de nombreux gènes, et chacun d’eux a un petit effet. Il est donc difficile de développer rapidement une résistance à la maladie au moyen de la sélection du blé. « C’est comme empiler des blocs Lego. Chaque bloc correspond à un gène qui joue un petit rôle, et dans la tour de Lego, beaucoup de blocs ont une incidence sur la résistance à la fusariose de l’épi », explique Samia.

Qu’est-ce que la fusariose de l’épi?

La fusariose de l’épi est une maladie fongique qui attaque les épis des petites céréales comme le blé, l’orge et le maïs. La maladie peut causer des dommages aux céréales et produire des mycotoxines (substances chimiques fongiques qui sont nocives pour les animaux). Lorsque des mycotoxines produites par la fusariose de l’épi sont détectées dans des cultures, ces dernières ne peuvent pas être vendues pour l’alimentation humaine ou animale.

Samia savait qu’elle pouvait changer la vie des agriculteurs grâce à ses recherches. Lorsqu’elle a eu l’occasion de travailler au Centre de recherche et de développement de Swift Current à titre de boursière du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, elle a plié bagage et est déménagée avec sa famille à l’autre bout du monde pour participer à la lutte contre la fusariose de l’épi.

Partie en mission

On pourrait s’attendre à ce que quiconque déménage de la Tunisie pour s’installer en Saskatchewan rurale vive un choc culturel. Samia reconnaît qu’il y a des différences entre les deux régions, mais sa passion pour son travail l’emporte sur tout le reste.

« Je veux seulement que le blé soit le meilleur possible. C’est une mission pour moi! », confie-t-elle.

Grâce à la génétique et à la cartographie moléculaire, Samia identifie les marqueurs moléculaires qui sont associés à la résistance à la maladie. Elle transmet ensuite cette information aux sélectionneurs de blé qui l’intègrent au processus de sélection assistée par marqueurs dans le cadre de leurs programmes de sélection pour accroître la résistance des cultivars (variétés) de blé canadiens. La mise au point de variétés résistantes représente des millions de dollars d’économies pour les agriculteurs canadiens. Voilà une énorme motivation pour Samia!

Il est là le blé, il est là

Il existe deux principaux types de blé qui poussent de façon exponentielle dans les provinces des Prairies, soit le blé de printemps (important dans la fabrication du pain) et le blé dur (pour la fabrication des pâtes), ce qui fait du Canada l’un des cinq principaux pays exportateurs de blé au monde. À elle seule, la Saskatchewan produit 82 % du blé dur du Canada et 41 % de notre blé de printemps.

Des cultivars de blé plus résistants aux maladies n’ont pas que des avantages pour les agriculteurs, mais aussi pour l’environnement, car ils réduisent la nécessité d’utiliser des produits chimiques. Par exemple, des variétés plus résistantes permettraient aux producteurs aux prises avec la fusariose de l’épi de réduire leur utilisation de fongicides (produits chimiques qui tuent les champignons). Les intrants chimiques coûtent cher et posent d’importants défis aux agriculteurs, car leur application doit être effectuée à des moments bien précis pour maximiser leur efficacité. Si la plante démontre une résistance naturelle à la maladie, les agriculteurs deviennent moins dépendants de l’application de produits chimiques. C’est un avantage pour l’environnement, les agriculteurs, le blé, les transformateurs de blé et les consommateurs.

Traverser le monde pour vivre sa passion n’est pas une mince tâche, mais c’est grâce à des scientifiques d’AAC comme Samia que les agriculteurs offrent les meilleures cultures possibles partout au pays. Les agriculteurs et la population canadienne remercient ces scientifiques chaque jour pour leur travail acharné, leur passion pour la recherche et le courage dont ils font preuve en adoptant une toute nouvelle culture.

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