L’argent pousse dans les arbres : l’application brise-vent de Colin Laroque sauve des arbres dans tout le Canada

Tout a commencé en 1903. Au début du siècle, le gouvernement canadien a commencé à offrir gratuitement des arbres aux propriétaires fonciers afin de favoriser la santé des écosystèmes forestiers. En plus d'un siècle, ces arbres sont devenus des images parmi les plus pittoresques et les plus emblématiques du Canada. On s'attendait à ce qu'ils fassent partie de notre identité. On s'attendait à ce qu'ils aient un beau feuillage à l'automne. Qu'est-ce qui n'était pas prévu? La façon innovante de M. Colin Laroque de les sauver plus de cent ans plus tard. Et non, ce n'était pas en s'enchaînant aux troncs.

Brise-vent : le coupe-vent de la nature

Les brise-vent sont des arbres plantés par l'humain, disposés en rangées de dix ou plus, qui servent d'abri ou de coupe-vent pour une portion de terrain donnée. Ils ont un effet sur les zones environnantes de diverses manières, notamment en modifiant les niveaux d'humidité du sol, en protégeant le bétail et les exploitations agricoles des vents violents et en empêchant la dérive des pesticides provenant d'autres exploitations. Les brise-vent peuvent être constitués d'arbustes, de grands arbres ou d'un mélange de différents types d'espèces d'arbres.

Hêtre ou ne pas hêtre : telle est la question.

En tant que chef du département de la science du sol à l'Université de la Saskatchewan et directeur du Center for Northern Agroforestry and Afforestation, Colin Laroque, Ph. D., a fait des arbres sa carrière. Au cours de sa vie, il a habité sur les deux côtes canadiennes, mais a toujours trouvé du réconfort dans les grandes branches feuillues qui s'étendent à travers le pays. Comme il le dit lui-même : « Je suis un homme des arbres ».

Il s'intéresse particulièrement aux arbres brise-vent, qui sont étonnamment abondants en Saskatchewan, province des Prairies célèbre pour son relief plat. Bien qu'ils constituent des coupe-vent naturels pour les fermes et les champs depuis plus de cent ans, leur valeur au-delà des rafales n'a jamais été évaluée.

Jusqu'à ce que Colin arrive.

Il a commencé à s'interroger sur l'état de ces arbres, notamment en Saskatchewan. « On en a envoyé tellement à travers le pays - plus d'un milliard! », dit Colin. Pourtant, il n'existait pratiquement aucune donnée sur leur développement ou leur contribution aux écosystèmes. Sans une idée claire de leur valeur, il était compréhensible que les agriculteurs commencent à déraciner les arbres. De leur point de vue, les arbres occupaient des terres précieuses pour les cultures et n'apportaient aucun avantage économique tangible.

Mais Colin savait qu'il y avait un revers à la médaille. Après qu'une sécheresse au début des années 2000 ait porté un coup dévastateur à l'agriculture dans les Prairies, l'une des rares grâces salvatrices a été la terre entourant les arbres brise-vent. Grâce à l'humidité accrue provenant de la neige abritée par les feuilles et les branches, la zone située sous ces arbres s'en est bien mieux sortie que le reste des terres. L'effet de ces arbres était stupéfiant et Colin s'est demandé si le même principe pouvait être appliqué aux brise-vent dans tout le pays.

Cependant, lorsqu'est venu le temps de convaincre les propriétaires fonciers de leurs mérites, Colin a dû prendre un autre chemin.

Rester bien planté

Monsieur Colin Laroque, l'« homme des arbres », niché entre trois bouleaux.

Pour prouver que les arbres brise-vent valent la peine d'être plantés, Colin a dû faire l'impossible : mesurer chacun d'entre eux et recueillir des échantillons de sol pour les analyser. Avec l'aide du Programme de lutte contre les gaz à effet de serre en agriculture (PLGESA1) d'Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) et de son successeur (PLGESA2), Colin a recruté des étudiants chaque été pour recueillir les données. Beau temps, mauvais temps, qu'il fasse jour ou nuit, ils se sont rendus dans toutes les régions de la province pour consigner les données sur les arbres pendant plus de dix ans.

Heureusement, leur travail n'a pas été en vain. Les arbres séquestraient en effet d'énormes quantités de carbone. Non seulement ils étaient extrêmement bénéfiques pour l'écosystème, mais ils compensaient également l'empreinte carbone des propriétaires fonciers. Comme le gouvernement du Canada venait d'instaurer une taxe sur le carbone en 2019, Colin et son équipe ont supposé que les autres verraient enfin que les arbres valent la peine d'être conservés.

Malheureusement, il y avait encore trop d'ambiguïté dans les données. La valeur monétaire des arbres n'était toujours pas évidente. Oui, il y avait une taxe, et oui, les arbres pouvaient en compenser une partie... mais de combien? Les agriculteurs, les propriétaires fonciers et le gouvernement du Canada n'avaient pas la réponse.

Son équipe est donc retournée à la table à dessin. Après avoir travaillé pendant des années avec les programmes PLGESA1 et PLGESA2, Colin a constaté que les données n'intéressaient pas seulement les agriculteurs et les propriétaires fonciers. Le programme, qui se concentre sur les universités, les instituts de recherche et les groupes de conservation faisant progresser la recherche, transférant de nouvelles technologies et adoptant des pratiques de gestion bénéfiques pour la réduction des gaz à effet de serre, a permis à Colin de présenter son travail à des conseillers politiques au niveau fédéral.

Grâce à leur contribution et à leurs conseils, Colin et une nouvelle génération d'étudiants ont trouvé un moyen de présenter les données d'une manière accessible à tous, et pas seulement aux propriétaires fonciers et aux agriculteurs.

Une application qui prend racine dans les données et l'argent

Les étudiants de Colin ont travaillé avec diligence pour mesurer les arbres en Saskatchewan

Lorsque la COVID-19 a frappé, Colin et son équipe ont été contraints de rester à l'intérieur comme le reste du monde. Ce fut un mal pour un bien : ils ont finalement eu l'occasion de déchiffrer les données et de développer une application qui permettrait aux utilisateurs de connaître la valeur monétaire des brise-vent en termes de compensation des émissions de carbone. Ils l'ont appelée le « Shelterbelt Decision Support System (en anglais seulement) » ou SDSS.

« Nous avons créé un mécanisme qui permet d'échanger tout avec tout le monde », explique Colin. « Si vous voulez des données, allez consulter les données. Si vous voulez de l'économie, allez voir l'économie. Tous nos modèles sont là. »

Plus important encore, les décideurs fédéraux et provinciaux ont reconnu la valeur des arbres et sont prêts à accorder aux agriculteurs et aux propriétaires fonciers de certaines provinces un crédit sur leur taxe carbone. Lorsqu'il est devenu évident qu'une mesure incitative l'emporterait sur le retour sur investissement des cultures, les agriculteurs avaient enfin une raison de conserver les arbres.

L'application SDSS a ouvert une toute nouvelle perspective sur les arbres. Et même si le programme est terminé, Colin continue de mettre à jour l'application régulièrement. Il prévoit d'étendre sa collecte de données à d'autres régions du pays, donnant ainsi à chacun un aperçu de l'importance du plus petit arbuste au plus grand arbre. Car comme nous le savons tous, le meilleur moment pour planter un arbre était il y a 20 ans. Et le deuxième meilleur moment est maintenant.

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