Résumé
- L'érosion du sol, c'est-à-dire le déplacement du sol d'un emplacement vers un autre, constitue une importante menace pour les sols agricoles du Canada.
- Il peut en résulter une diminution de la productivité agricole, une réduction du rendement économique et une détérioration des ressources en eau.
- L'indicateur du risque d'érosion du sol mesure le risque d'érosion du sol attribuable au vent, à l'eau et au travail du sol. Il permet aussi d'évaluer l'évolution d'une situation donnée au fil le temps.
- Le risque d'érosion du sol au Canada a considérablement diminué depuis 1981 en raison du recours accru au travail de conservation des sols et grâce à la diminution du recours à la jachère.
- Toutefois, le risque a augmenté entre 2011 et 2016 alors que les avantages attribuables à ces améliorations ont atteint un plateau.
- Les méthodes visant à réduire le risque d'érosion du sol comprennent la poursuite du travail de conservation du sol, ainsi que des mesures de gestion du vent et de l'eau, surtout dans les zones à risque comme les paysages de collines.
Érosion du sol au Canada : pourquoi est-ce important?
L'érosion du sol, c'est-à-dire le déplacement des sols d'un emplacement vers un autre, constitue une importante menace pour les sols agricoles du Canada. L'érosion entraîne la perte de la couche superficielle du sol (terre arable) et réduit les matières organiques du sol, ce qui contribue à la dégradation de la structure du sol. Ces facteurs amoindrissent la fertilité du sol et réduisent le mouvement de l'air et de l'eau à la surface du sol, ce qui peut nuire au rendement des cultures. En fait, même dans un même champ, le rendement des cultures peut être beaucoup plus faible dans des sols fortement érodés que dans des sols non érodés.
L'érosion du sol peut aussi avoir d'importantes répercussions environnementales en raison du ruissellement vers les drains agricoles, les fossés et les cours d'eau. Cela peut entraîner des problèmes de qualité de l'eau, comme une eau plus trouble (la turbidité), la sédimentation et l'accumulation de nutriments, ainsi qu'en raison des pesticides, d'agents pathogènes et d'autres substances.
L'érosion du sol a aussi d'importantes répercussions économiques. La réduction du rendement des cultures découlant de l'érosion du sol s'élevait, à elle seule, à un coût estimatif 3 milliards de dollars par année en 2011. Cela correspondait à 10 % de la valeur totale des cultures agricoles. De plus, on s'attend à ce que les changements climatiques augmentent le risque d'érosion du sol en raison d'une augmentation des conditions de sécheresse du sol.
Le gouvernement du Canada fait état de l'érosion des sols sur les terres agricoles. Ces renseignements aident la population canadienne à déterminer si les terres agricoles du Canada sont en bonne santé et dans quels cas des améliorations doivent être apportées aux pratiques agricoles.
Qu'est-ce qui cause l'érosion du sol?
L'érosion du sol se produit sur les sols agricoles par trois principaux processus : l'érosion éolienne (par le vent), l'érosion hydrique (par l'eau) et l'érosion due au travail du sol. L'érosion éolienne et hydrique se produit naturellement dans l'environnement. Toutefois, ces processus peuvent être accélérés par des activités agricoles comme la jachère et les cultures agricoles annuelles. L'érosion éolienne est une préoccupation dans de nombreuses régions du Canada, mais le plus grand risque d'érosion éolienne se produit dans les Prairies. Cette situation est attribuable au climat chaud et sec de la région, ainsi qu'aux grandes superficies de terres cultivées qui bénéficient de peu de protection contre le vent.
L'érosion due au travail du sol est l'effet d'un déplacement du sol depuis le sommet vers la base des collines. Ce type d'érosion est plus marqué dans les terrains qui présentent de nombreuses pentes courtes et abruptes et dans les régions où sont pratiquées des cultures intensives avec travail du sol. L'érosion due au travail du sol peut aussi accroître l'impact de l'érosion par le vent et par l'eau, y exposant le sous-sol, qui est souvent plus sensible à ces deux autres formes d'érosion. Elle a aussi pour effet de déplacer le sol vers des zones où l'érosion hydrique est la plus intense.
Les décisions en matière d'agriculture peuvent avoir une incidence sur l'érosion de différentes façons, de sorte qu'un contrôle efficace de l'érosion nécessite des solutions qui tiennent compte de tous les processus d'érosion. L'utilisation de rideaux d'arbres (brise-vents) et de terrasses de déviation de l'eau peut réduire l'érosion causée par le vent et par l'eau, mais l'ajout de ces obstacles aux bords des champs peut toutefois accroître la perte de sol causée par l'érosion due au travail du sol. L'utilisation du chisel laisse davantage de résidu de culture à la surface du sol par rapport à l'utilisation de la charrue à socs et versoirs, ce qui fournit une protection contre l'érosion due au vent et à l'eau. Par contre, le chisel est susceptible de déplacer le sol plus loin que la charrue à socs et versoirs, ce qui entraîne une plus grande érosion due au travail du sol. L'ensemencement direct à perturbation élevée (utilisé dans certains systèmes de culture sans labours) peut causer autant d'érosion due au travail du sol que la charrue à socs et versoirs, car cela déplace le sol sur de grandes distances.
Indicateur du risque d'érosion du sol
L'indicateur du risque d'érosion du sol mesure le risque d'érosion du sol causée par vent, l'eau et le travail du sol. Il mesure également si cette situation évolue dans le temps. Il tient compte du climat, des caractéristiques du sol, de la topographie et du type de pratiques agricoles employées (ces informations étant recueillies à partir des données du Recensement de l'agriculture). L'érosion du sol est estimée au moyen des données de relief, de sol et de topographie de la Base nationale de données sur les sols. Elle est calculée comme une perte de sol sur tous les segments d'une forme de relief (pente supérieure, pente médiane, pente inférieure et dépressions). Les pertes de sol dues au vent et au travail du sol sont plus importantes sur les pentes supérieures, tandis que les pertes dues à l'érosion due à l'eau sont plus importantes sur les pentes médianes.
Les quantités de perte de sol pour chaque période sont déclarées en cinq catégories de risque : très faible, faible, modérée, élevée et très élevée. On considère que les zones classées dans la catégorie de risque très faible peuvent soutenir des cultures à long terme et préserver la santé environnementale du sol. Les zones d'autres catégories présentent un certain niveau de risque et nécessitent des pratiques de conservation du sol afin de soutenir la production agricole à long terme et la santé environnementale.
Le gouvernement du Canada calcule l'indicateur du risque d'érosion du sol tous les cinq ans. Cet indicateur aide le gouvernement à évaluer l'évolution de l'érosion des sols sur les terres agricoles au fil du temps, puis à cerner les changements qui doivent être apportés aux pratiques agricoles.
Érosion du sol au Canada — état actuel et évolution dans le temps
En 2016, l'état de l'environnement ayant trait au risque d'érosion du sol dans les terres agricoles du Canada était au niveau « souhaitable ». Au Canada, le système de culture qui entraîne le plus grand risque d'érosion du sol est la culture des pommes de terre dans les Maritimes, laquelle nécessite un travail intensif du sol. Le risque d'érosion du sol est également élevé pour les systèmes de culture du maïs et du soja qui utilisent un travail du sol conventionnel. Toutefois, le maïs et le soja peuvent tous deux être cultivés au moyen d'un travail de conservation du sol. En ce qui concerne les formes de relief, le risque le plus élevé d'érosion du sol est associé à des pentes d'un gradient de 10 % ou plus. C'est notamment le cas dans l'est du Canada, où les conditions climatiques augmentent les risques d'érosion hydrique.
L'érosion du sol est particulièrement préoccupante lorsque les types de cultures à risque sont cultivés dans des paysages à risque élevé. C'est le cas d'une proportion importante des terres agricoles du sud de l'Ontario et des provinces de l'Atlantique. Toutefois, dans toutes les provinces, certaines régions posent un risque élevé d'érosion du sol, y compris les pentes abruptes de la région de Hand Hills dans le sud de l'Alberta, les sols très secs et loameux qui sont exposés au vent dans le sud de la Saskatchewan, et les pentes abruptes le long de l'escarpement du Manitoba.
Dans l'ensemble, le risque d'érosion du sol dans les terres cultivées au Canada a diminué entre 1981 et 2016. Au cours de cette période, la proportion de terres cultivées correspondant aux catégories à risque élevé a diminué d'environ 50 %. Parallèlement, la proportion des terres cultivées appartenant à la catégorie à très faible risque a augmenté de 40 %. Cette amélioration est principalement attribuable à l'utilisation accrue du travail de conservation du sol (en particulier les systèmes sans labours) et à la diminution du recours à la jachère dans les Prairies.
Depuis 1981, la proportion de terres cultivées au Canada utilisant le travail de conservation du sol est passée de 2 % à 59 %. Il s'agit maintenant de la pratique la plus courante du travail du sol dans les Prairies, utilisée pour 73 % des terres cultivées en Saskatchewan et 69 % en Alberta. Bien que l'intensité du travail du sol ait diminué pour la plupart des types de cultures, c'est l'adoption de systèmes sans labours dans les cultures céréalières qui a eu l'incidence la plus positive quant au risque d'érosion du sol. Cela s'explique par le pourcentage très élevé des terres cultivées qui sont consacré à la production céréalière. Au cours de la même période, l'utilisation de la jachère a aussi diminué, passant de 24 % à 2 %.
En revanche, les changements dans le type de cultures cultivées n'ont eu qu'une incidence plus faible sur le risque d'érosion. Depuis 1981, la proportion de terres utilisées pour des cultures exigeant un travail intensif du sol (comme le maïs, les pommes de terre et les haricots) est passée de 5 % à 22 %. Au cours de la même période, la proportion de terres utilisées pour des cultures à résidus élevés nécessitant très peu de travail du sol (comme la luzerne et le foin) est passée de 14 % à 15 %.
Malgré une amélioration globale depuis 1981, le risque d'érosion du sol a augmenté entre 2011 et 2016. Cela donne à penser que la réduction du risque d'érosion attribuable aux changements continus dans les pratiques pourrait avoir atteint un plateau.
Comment peut-on réduire l'érosion du sol?
L'efficacité des techniques de réduction de l'érosion du sol dépend du type de système agricole, du climat et des caractéristiques du terrain (comme la texture du sol et les pentes).
Toutes les formes d'érosion du sol peuvent être réduites en utilisant un travail du sol moins intensif sur les terres cultivées. Cette façon de faire réduit le mouvement du sol. Cela réduit aussi la quantité de résidus de culture qui se retrouve incorporée dans le sol, ce qui protège le sol des forces érosives du vent et de l'eau.
Pratiques permettant de réduire l'érosion du sol causée par l'eau :
- Travail de conservation du sol;
- Semis de cultures en rangs perpendiculairement à la pente;
- Cultures en bandes;
- Cultures intercalaires en rangs;
- Cultures couvre-sol.
Lorsque le risque d'érosion hydrique est très élevé, d'autres pratiques pourraient être nécessaires :
- Aménager des terrasses pour réduire la pente et la longueur;
- Établir des bermes permanents, ou terrasses de déviation, le long des contours;
- Reconvertir la terre en couvert de végétation pérenne;
- Construire des voies d'eau gazonnées ou des structures de contrôle de l'érosion pour lutter contre l'érosion en ravins.
Pratiques permettant de réduire l'érosion causée par le travail du sol :
- Concentrer les efforts sur les paysages de collines qui sont les plus sujets à l'érosion;
- Utiliser des systèmes sans labours pour cultiver les cultures, ou choisir des cultures qui ne nécessitent pas de labour (comme le fourrage);
- Dans les systèmes de culture qui nécessitent une perturbation du sol (comme la production de pommes de terre), utiliser des outils de travail du sol qui déplacent moins de sol et qui le déplacent sur une plus courte distance;
- Dans la mesure du possible, recourir à un travail du sol en contours plutôt qu'à des pentes montantes et descendantes; utiliser une charrue à socs et versoir qui porte le sillon vers le haut de la pente.
La réduction ou l'arrêt de l'érosion du sol ne rétablit pas immédiatement la santé et la productivité du sol. Parfois, il peut falloir des décennies, voire des siècles, pour que les sols fortement érodés redeviennent productifs et rentables. La restauration sol-paysage peut être utilisée pour restaurer rapidement les sols érodés. Il s'agit de recueillir la riche terre végétale dans des zones où l'érosion antérieure du sol a entraîné l'accumulation du sol (comme la base des collines) et de la déplacer vers le haut de la pente, c'est-à-dire vers des zones de perte de sol. Dans certaines régions, il a été démontré que cette pratique augmente le rendement des cultures de 20 à 50 % et que la biomasse des cultures peut atteindre 95 %.
Pour en savoir plus
Indice de risque d'érosion du sol — informations techniques
Indicateurs connexes
- L'indicateur de la matière organique du sol permet de suivre la santé des sols agricoles canadiens, car il est associé à la teneur en carbone du sol.
- L'indicateur du risque de salinisation du sols permet de suivre le risque de salinisation des sols dans les Prairies.
- L'indicateur de la couverture du sol permet de suivre le nombre de jours par année où les sols sont protégés par une culture ou par de la neige.
Autres ressources et documents téléchargeables
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